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prince don Pamphile son fils. Elle tolérait parfois la présence de ses gendres et de ses filles, mais sans pouvoir supporter même l’idée de voir la princesse de Rossano, qui lui était devenue odieuse. Dans l’excès de son dépit et de sa colère, elle attribuait aux conseils de cette jeune femme le traitement rigoureux qu’elle avait éprouvé, se figurant que la princesse usurpait déjà auprès du nouveau pontife un ascendant et une autorité qui la faisaient mourir de jalousie.

« Cette femme causera ma mort ! répétait-elle à Antoine Barberin et à Azzolini, les deux personnes devant qui elle s’ouvrait avec le plus de confiance depuis sa disgrâce. Aidez-moi à me débarrasser d’elle ! Il n’y a qu’elle qui me gène, qui me nuit ! sans elle le pape m’eût écoutée, j’en suis certaine ! » Et en tenant ce langage dona Olimpia pleurait et se roulait sur son lit. Vainement les deux cardinaux s’efforçaient-ils par leurs raisonnements de lui démontrer l’invraisemblance de ses suppositions. « La rigueur que vous a montrée le saint-père, faisait observer Azzolini, ne vous est pas particulière, madame. Sa sainteté avait déclaré avant que vous ne vous présentassiez devant elle, qu’elle ne recevrait aucune personne de votre sexe. — Et pourquoi donc la princesse de Rossano a-t-elle été reçue avec son fils ? » s’écria dona Olimpia, se levant furieuse sur son séant, puis retombant tout à coup suffoquée par la colère.

Antoine et Azzolini s’éloignèrent un instant en déplorant l’aveuglement où la passion jetait dona Olimpia, lorsqu’elle les rappela près d’elle. « Antoine, dit-elle, quoique vous m’ayez donné bien des témoignages de sincère attachement, je vous demanderai encore un service. — Lequel, princesse ? — Je vais vous paraître déraisonnable et vous m’en voudrez ; mais c’est la dernière démarche que je vous prierai de faire en ma faveur ! — De quoi s’agit-il, madame ? — Allez chez le pape, obtenez de lui qu’il me reçoive ! Ô Antoine ! dit-elle en lui secouant les mains avec vivacité, faites cela pour moi, pour notre famille ; Antoine ! vous comprenez ? pour toute notre famille ! »

Le cardinal Azzolini, effrayé de ce nouveau projet, crut devoir en détourner l’exécution dans l’intérêt de dona Olim-