Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/434

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pia et du cardinal Antoine lui-même. Avec cette subtilité d’expression qui lui permettait d’exposer la complication des affaires les plus délicates sans effleurer même la susceptibilité de ceux qu’elles concernaient, il donna à entendre que la cause et les biens des familles Pamphile et Barberine réunies seraient beaucoup plus utilement défendus par les parents de dona Olimpia que par la princesse elle-même ; que ses enfants et ses gendres étaient les avocats nés de cette cause depuis la mort d’Innocent, tandis qu’au contraire la moindre requête adressée directement par la personne à laquelle la haine populaire s’était attachée, rendrait toute faveur impossible.

Azzolini parla longtemps, et le cardinal Antoine partageait entièrement son avis, lorsque dona Olimpia, qui paraissait avoir écouté avec un grand calme, l’interrompit tout à coup : « Vous avez raison, éminence, dit-elle ; mais s’il faut conserver quoi que ce soit par la protection de la princesse de Rossano, mieux vaut tout perdre. » Puis, s’adressant au cardinal Antoine : « Allez parler au pape, » lui répéta-t-elle en ayant plutôt l’air de lui donner un ordre cette fois que de lui demander un service.

En sortant du palais Pamphile, les deux cardinaux se communiquèrent les craintes que leur faisait concevoir l’entêtement de dona Olimpia. « Cette femme veut assurément sa perte, dit Azzolini, et je suppose que vous serez assez prudent pour ne pas faire ce qu’elle désire. — Comment l’éviter ? demanda Antoine ; cela ne m’est pas possible. — Vous avez tort pour elle et pour vous. — J’espérais, dit Antoine avec quelque hésitation, que vous m’accompagneriez chez le saint-père pour faire cette demande. — Vous avez eu tort, répondit Azzolini avec fermeté. J’estime cette démarche trop dangereuse pour y prendre part ; et je veux y rester étranger, afin de me conserver la faculté d’obvier au mal si cela est possible, quand il sera fait. »

Antoine avait de la faiblesse dans le caractère, et quoique la raison lui fît partager le sentiment d’Azzolini, il n’eut pas la force de résister à la volonté passionnée de dona Olimpia. Il demanda une audience au pape dans laquelle il réclama