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infamies qui le conduisirent à l’échafaud ; Cecchini était aussi un honnête homme ; mais il manqua de force à ce point qu’il risqua d’être confondu avec le plus vil coquin. Il porta la peine de cette faute. Quoique l’aveugle confiance d’Innocent X accordait au sous-dataire ne permît réellement pas à Cecchini de surveiller les actes.de son subordonné, le pontife ne put cependant s’empêcher de punir celui qui était ostensiblement responsable des actes passés à la daterie. Il le mit en quelque sorte en prison dans son propre palais, lui interdisant le droit d’assister aux consistoires, aux congrégations et aux cérémonies de la cour. Cecchini en éprouva une honte qui flétrit son âme et affaiblit sa raison. Presque toutes les nuits il se réveillait en sursaut, croyant entendre le bruit d’une hache tombant avec violence sur un billot.

Parmi tous les scandales de cette époque, l’élévation de Rasponi au cardinalat, sous Alexandre VII, ne fut pas un des moins éclatants. On se souvient non-seulement des services que cet homme, étant prélat, rendit à la famille Pamphile, mais aussi des complaisances criminelles qu’il eut en favorisant plus tard les opérations frauduleuses de dona Olimpia. Cependant, malgré ces grands défauts, Rasponi était un de ces hommes habiles, actifs, intelligents, dont les talents incontestables, dont l’énergie de caractère et la suite de leurs idées font honte à la paresse et au défaut d’énergie si commun chez ceux qui ne sont que vulgairement honnêtes. Signalé pour avoir prêté les mains aux exactions les plus affreuses, désigné dans Rome par le titre de sangsue du peuple, Rasponi sut toutefois remplir avec tant de talent les emplois dont il fut successivement revêtu, qu’il put braver les clameurs publiques, se rendre utile aux grands, gagner enfin la confiance d’Alexandre VII, et servir l’état. D’abord auditeur du cardinal François Barberin, puis de Flavio Chigi, il s’éleva bientôt à l’emploi d’abréviateur de la daterie, devint référendaire de l’une et l’autre signature de cet office, puis secrétaire de la Consulta et avocat du saint-office. Enfin, pendant la peste qui affligea Rome, ayant été nommé secrétaire de la congrégation de santé, par Alexandre VII, il déploya en cette occasion autant de talent que de courage.