Page:Delille - L Homme des champs 1800.djvu/57

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Pour compagons, des bois, des oiseaux et des fleurs.
Je l’aimois, je l’aimois jusque dans ses horreurs :
J’aimois à voir les bois, battus par les tempêtes,
Abaisser tour à tour et redresser leurs têtes ;
J’allois sur les frimats graver mes pas errans,
Et de loin j’écoutois la course des torrens.
Mais tout passe ; aujourd’hui qu’un sang moins vif m’enflamme,
Que les besoins des sens font place à ceux de l’ame,
S’il est long-temps désert, le plus aimable lieu
Ne me plaît pas long-temps ; les arbres parlent peu,
Dit le bon Lafontaine, et ce qu’un bois m’inspire,
Je veux à mes côtés trouver à qui le dire.
Ainsi, fermant la porte au sot qui de Paris
S’en vient tuer le temps, la joie et vos perdrix,
De ceux qu’unit à vous une amitié sincère
Préparez, décorez la chambre hospitalière.
Ce sont de vieux voisins, des proches, des enfans,
Qui visitent des lieux chers à leurs premiers ans :
C’est un père adoré qui vient, dans sa vieillesse,
Reconnoître les bois qu’a plantés sa jeunesse ;
La ferme à son aspect semble se réjouir,
Les bosquets s’égayer, les fleurs s’épanouir.
Tantôt c’est votre ami, votre ami de l’enfance,
Qui de vos simples goûts partage l’innocence.
Chacun retrouve là ses passe-temps chéris,
Son meuble accoutumé, ses livres favoris.