Page:Delille - L Homme des champs 1800.djvu/96

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Le lac plus d’une fois sur ses flots complaisans
Du rivage opposé leur porta les présens,
Les beaux fruits de Dolon, les fleurs de la bergère.
Souvent l’heureux Dolon sur sa barque légère
Visitoit l’île heureuse. On sait que de l’amour
Les îles en tout temps sont le plus cher séjour.
Celle-ci n’étoit point la magique retraite
Que d’Alcine ou d’Armide enfanta la baguette ;
Un charme encor plus doux y fixoit ces amans :
Se voir, s’aimer, voilà leurs seuls enchantemens.
Falloit-il se quitter ? Condamnés à l’absence,
En perdant le plaisir ils gardoient l’espérance.
Enfin le tendre amour, au gré de leur ardeur,
Voulut unir leur sort, comme il unit leur cœur.
Parmi les déités que révèrent ces ondes,
Doris fut la plus belle : en ses grottes profondes
Le lac n’enferma point un plus rare trésor.
Sous les flots azurés brilloient ses tresses d’or :
L’eau s’enorgueillissoit d’une charge aussi belle,
Les flots plus mollement murmuroient autour d’elle :
Les nymphes l’admiroient. Le jeune Palémon
Pour elle de sa trompe adoucissoit le son,
Et jamais chez Thétis nymphe plus ravissante
Ne reçut les baisers de l’onde caressante.
Éole l’adoroit, et son fougueux amour
Vainement l’appeloit dans sa bruyante cour ;