Page:Delluc - Monsieur de Berlin, 1916.djvu/108

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est bien occupé, en ce moment, à voir défiler les armées du Tsar à Krasnoïé-Sélo. Nous y renonçons, nous bornant à une discrète inspection. Il paraît que mon incognito est absolu. La rapidité de cette course nous prémunit contre les indiscrétions immédiates. Et puis l’empire ne ressemble pas à Berlin. Mais peut-être chacun a-t-il compris l’attitude qu’il doit adopter ? Berlin a l’air détendu parce qu’il faut que Berlin ait l’air détendu. Les campagnes ont leur activité grave et les soldats une espèce de silence profond que l’on sent prêt à éclater, sur d’autres terres, en hymnes et en fureurs.


Quatre heures : Dusseldorf.

Six heures : Cologne.

Des hommes, des hommes, des hommes. Des armes. De l’ordre. De la force.

Un silence inouï sur ces masses. Comment le monde ne sent-il pas que la grande armée de l’empire allemand se prépare et médite ?

La nuit. Aix-la-Chapelle.

Vieille ombre qui se souvient des nuits impériales, cité de passé et de rêveries, comme le présent, comme l’avenir la dominent ce soir ! Rien n’est changé cependant dans la sérénité grandiose de la ville, et son odeur d’histoire morte l’écrase d’un lourd sommeil. Mais on sent