Page:Delluc - Monsieur de Berlin, 1916.djvu/35

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J’étais déçu et je sentais ma curiosité grandir. Il ne m’avait rien dit en somme, ce Schmidt, ce Schmidt de Berlin, mais je sentais qu’une idée l’avait intéressé à moi, une idée fixe que je ne devinais pas, mais qui devait être puissante, qui devait être toute sa folie.

Quel homme étrange, cet aliéné qui avait sauvé évidemment une vigueur étonnante de jeunesse et qui avait pourtant un aspect de vieillard fini. Officier, sans doute, un air de chef, une nature de commandement et de force, oui, un officier, quelque ancien maréchal de camp, frappé de désordre en son cerveau, obligé de renoncer à ses soldats, à la cour aussi, puisqu’il venait de Berlin, du cœur même de Berlin royal et impérial. Un officier, un chambellan, peut-être, qui ?

Je saurais certainement. Il avait, cet homme, quelque chose à me dire. Pourquoi avait-il sursauté au mot de journal et de journal français ? Comme j’avais hâte de le retrouver, de lui arracher des paroles ! Mais pourquoi avais-je été si maladroit pendant cette rapide entrevue ? Je pouvais l’aider à parler, je pouvais le deviner, je pouvais, je devais, ah ! maladroit ! maladroit !

Par honneur, Anna eut la visite du docteur Evans qui l’occupa tout l’après-midi et Claude me demanda de ne pas l’obliger à la conversa-