Page:Delluc - Monsieur de Berlin, 1916.djvu/40

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ma journée à confesser Claude Arzeu de ses toutes petites inquiétudes et de ses espoirs merveilleux. Il s’y prêta avec la foi de l’amitié. Anna, sachant que mes dernières paroles ne porteraient que du bonheur à Claude et du bonheur à elle, indirectement, nous laissait dialoguer avec abandon.

Comme je menais mon ami sous les verdures des allées où il y a de la brise, où il y a de l’ombre douce, et aussi où il fait bon tenir le bras d’un ami, le valet de Schmidt nous rejoignit. Il me tira par la manche pour m’écarter de Claude et me dit rudement, sur un ton qu’il voulait confidentiel, que son maître tenait à me voir avant que je ne parte. Il parlait bas, avec effort, et cette discrétion « entre les dents » lui donnait un air très méchant.

Claude me dit avec un sourire :

— Vas-y immédiatement : ou bien tu seras étranglé, ou bien ça en vaut la peine.

Et pour le valet :

— Si tu as jamais à porter un message d’amour, il faudra que tu prennes des leçons.

Déjà l’homme s’éloignait vers la maison, me faisant signe de le suivre.

— Vas-y, me dit Claude. Je t’attendrai sur un banc et tu me ramèneras chez nous en me racontant ces folies.