Page:Delluc - Monsieur de Berlin, 1916.djvu/65

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Puis elle a expliqué, avec son sourire de tout à l’heure :

— On m’appelle Misaine,

On s’est récrié. Je trouve ce Misaine de bon goût. Et chacun de conter des histoires de surnoms. Je ne me rappelle plus ce qu’ils ont dit. Je pensais que c’est très agréable à entendre ce nom de Misaine. Pourquoi Misaine ? Elle s’appelle Marie. Je ne vois pas… On l’appelle Misaine. Qui a trouvé ça ? Le mari peut-être. Non : ce doit être un gros chauve trop absorbé. Sa mère, sans doute, quand elle était enfant…

Mais Préveil de Chertemps tenait à placer une anecdote qui m’a paru d’ailleurs assez piquante. Un grand compositeur français, très célèbre, très applaudi, très décoré, avait beaucoup aimé. Il s’était passé la fantaisie touchante et ironique de faire relier les manuscrits de ses opéras sous des couvertures somptueuses, où s’inscrivait l’initiale respective de la dame qu’il chérissait au moment de cet ouvrage. Même, certains volumes portaient plusieurs initiales. Et, par gaminerie de vieillard, qui se souvient, il nommait souvent les ouvrages par le nom de ses maîtresses, au lieu de les nommer par leurs titres véritables. Il ne disait plus « Thérésina » ou « Aspasie » à ses intimes, mais « Salta Saltaryn » ou « Powieska ». Le malheur fut qu’un jour de deuil, représentant