Page:Delluc - Monsieur de Berlin, 1916.djvu/86

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jets dévastateurs. Près d’elle j’ai senti que de nouvelles vengeances me dévasteraient moi-même plus que les autres. Mais elle est venue bien tard et peut-être suis-je à la veille d’être lié à des chaînes que j’ai formées et dans l’obligation d’obéir dignement à l’homme que j’étais auparavant. Je voudrais la revoir. Je voudrais mettre au point l’impression étrange qui me vient d’elle. Je saurais alors si elle est bien, dans cette époque de ma vie, la chose nouvelle que je crois attendre, et peut-être un mot d’elle, ou une inspiration de sa présence, m’indiqueront si je dois me rebeller contre mes vieilles rages et leurs esclaves impérieux, ou si je dois me livrer de nouveau au passé formidable de nos querelles.

Heimann fera ce qu’il faut. Il s’arrangera, ce garçon, pour l’amener au Frédéric ou pour l’obliger de m’attendre quelque part. Il n’a qu’à chercher, qu’à trouver, qu’à parler. C’est un homme intelligent, formé à mon école et à mon contact. Qu’est-ce que je demande en somme ? Quelques minutes de conversation avec une bourgeoise de Paris. Rien de plus simple. Elle est à Kiel, Heimann lui dit que je veux la voir, elle vient, je parle et tout est bien. Rien de plus simple, rien de plus simple ! Et je suis intimidé pourtant, comme devant l’invraisemblable.

Voici Heimann.