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crée naturellement un art indépendant. Jules de Goncourt pensait, avec Shakspeare, que tout est bien qui finit bien, et — quoiqu’il ne fût pas jésuite — il était d’avis que la fin justifie les moyens.

Après sa mort, M. Philippe Burty eut l’idée de faire connaître au public, par des reproductions sur bois, ces aquarelles qui n’avaient jamais été exposées et de réunir l’œuvre gravé de son ami. Jules n’avait pas illustré seulement l’Art du dix-huitième siècle, il avait transporté sur le cuivre sept dessins de Gavarni et un assez grand nombre de pièces diverses. M. Ph. Burty venait de faire avec succès une publication de l’œuvre gravé du fameux chirurgien anglais Seymour Haden. Il s’ouvrit de son projet à M. Edmond de Goncourt qui, l’approuvant, lui répondit, à quelques jours d’intervalle, par les deux lettres suivantes :

Bar-sur-Seine, 30 juin 1870.
Cher ami,

Que vous êtes obligeant et qu’aimablement vous caressez ma douleur ! Votre idée du petit livre pour les amis me sourit. Il faut vous dire que, peu de jours avant sa mort, il m’avait dit : « Je voudrais réunir mes eaux-fortes de Gavarni. Je demanderai cela à Burty qui sait fabriquer un livre avec une préface. »

Je suis un peu souffrant. Toute la fatigue de ces jours derniers s’est tournée en irritation d’entrailles ; mais cela n’a rien d’inquiétant.

Figurez-vous que je ne connais pas l’article de Saint-Victor[1]. J’ai un ardent désir de le lire. Vous seriez bien aimable de l’envoyer. Par la même occasion, si vous pouvez vous procurer un article de Banville publié dans le National du 26 ou 27 courant, jetez-moi-le à la poste.

Tout à vous de cœur,
Edmond de Goncourt.

  1. Il s’agit de l’article nécrologique dont il a été question plus haut (Liberté, 27 juin 1870).