Page:Desbordes-Valmore - Poésies, 1822.pdf/227

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
211
DIVERSES.

» Mais ici… plus jamais nous n’y serons ensemble.
» On m’a volé mon fils, on l’emmène… il mourra,
» Et tu ne verras plus d’enfant qui lui ressemble.
» Que ne suis-je insensée !… en mes rêves confus
» Je serais, comme toi, froide, austère, farouche,
» Et le doux nom d’Arthur, exilé de ma bouche,
» Fuirait de ma mémoire, et je n’aimerais plus !
» Je préfère la mort à ce songe immobile ;
» Je veux aimer toujours ce que j’ai tant aimé,
» Arthur, mon cher Arthur, qu’en ta pitié stérile
» Tu ne m’as pas nommé !
» Oh ! parle-moi d’Arthur !… Mais tu ne peux m’entendre.
» Hélas ! ce que le ciel a formé de plus tendre,
» Son miracle d’amour est-il connu de toi ?
» C’est le cœur d’une mère, et je le porte en moi,
» Et je n’ai plus d’enfant ! et sa grâce enchaînée,
» Et ses pas inégaux que je guidais encor,
» Loin de ma destinée
» Ont emporté son sort !
» Et ce noble arbrisseau dont la tige brisée
» Promettait à mes yeux, hélas ! un fruit si beau,
» Va languir sans amour, sans soleil, sans rosée,
» Sans fleur pour mon tombeau !…

» Non, je ne suis pas insensée !
» Ma raison toute entière éclate dans mes pleurs.