Page:Descartes - Œuvres, éd. Adam et Tannery, III.djvu/392

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)8o Correspondance. i, soy-sos.

tiens de la volonté auant qu'elles foient exercées, elle emporte auec foy l'Indifférence, prife dans le fé- cond fens que ie la viens d'expliquer, & non point dans le premier. C'efl à dire qu'auant que noftre vo- lonté fe foit déterminée, elle eft toufiours libre, ou a 5 la puiffance de choifir Ivn ou l'autre de deux con- traires, mais elle n'eft pas touiiours indifférente; au contraire, nous ne délibérons iamais qu'à delTein de nous ofler de cet état, où nous ne fçauons quel party jprendre, ou pour nous empefcher d'y tomber. Et bien lo qu'en oppofant^ noflre propre iugement aux comman- demens des autres, nous ayons coutume de dire que nous fommes plus libres à faire les chofes dont il ne nous eft rien commandé, ^^ où il nous eft permis de fuiure noftre propre iugement, quà faire celles qui i5 nous font commandées ou deffenduës ; toutesfois, en oppofant nos iugem.ens ou nos connoiftances les vnes aux autres, nous ne pouuons pas ainfi dire que nous foyons plus libres à faire les chofes qui ne nous fem- blent ny bonnes ny mauuaifes, ou dans lefquelles 20 nous voyons autant de mal que de bien, qu'à faire celles ou nous apperceuons beaucoup plus de bien que de mal. Car la grandeur de la liberté confifte, ou dans la grande facilité que l'on a à le déterminer, ou dans le grand vfage de cette puiffance pofitiue que nous iS auons de fuiure le pire, encore que nous connoiflions le meilleur. Or eft-il que, ii nous embraftons les chofes que noftre raifon nous perfuade eftre bonnes, nous nous déterminons alors auec beaucoup de facilité ; que 11 nous faifons le contraire, nous faifons alors vn îo

a. Clerselier : poposant; Cousin : proposant (à tort).

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