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III, 465-466.
Correspondance.


rien désirer dauantage; et ie n'ay pas seulement été surpris d'étonnement, en la voyant, mais ie ne puis m'abstenir d'ajouter que i'ay efté auffi ravi de joie, & ay pris de la vanité de voir que le calcul, dont fe fert Vôtre Altesse, eft entièrement femblable à celuy que i'ay propofé dans ma Géométrie. L'expérience m'auoit fait connaître que la plufpart des efprits qui ont de la facilité à entendre les raifonnemens de la Métaphysique, ne peuvent pas conceuoir ceux de l'Algèbre, & réciproquement, que ceux qui comprennent aifément ceux-cy, font d'ordinaire incapables des autres ; et ie ne vov que celuy de Votre Altesse, auquel toutes chofes font également faciles. Il eft vray que i'en auois défia tant de preuves, que ie n'en pouvais aucunement douter ; mais ie craignois feulement que la patience, qui eft nécessaire pour furmonter, au commencement, les difficultez du calcul, ne luy manquait. Car c'eft vne qualité qui eft extrêmement rare aux excellens efprits, & aux perfonnes de grande condition.

Maintenant que cette difficulté eft furmontée, elle aura beaucoup plus de plaifir au reste; &. en substituant vne feule lettre au lieu de plufieurs, ainfi qu'elle a fait icy fort souvent, le calcul ne luy fera pas ennuyeux. C'eft vne chofe qu'on peut quasi toujours faire, lors qu'on veut feulement voir de quelle nature eft vne queftion, c'eft à dire fi elle fe peut soudre auec la règle & le compas, ou s'il y faut employer quelques autres lignes courbes du premier ou du 2(d) genre &c, & quel eft le chemin pour la trouver ; qui eft ce de quoy ie me contente ordinairement, touchant les