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son émancipation morale.

En effet, oser lire les journaux, sans autorisation ; se permettre de les critiquer, de penser autrement qu’eux ; placer en face de leur raisonnement son propre raisonnement — lorsqu’on a toujours été en tutelle morale, — ce sont là des signes évidents que le moi se réveille à demi et risque un œil au soleil.

Mais… c’est tout — quoique peu !

Les éclairs sont rapides et rares ; et la lueur fugitive qu’ils projettent se perd bientôt dans les sombres nuages de la somnolence intellectuelle de notre héros.

Georges se dit qu’il fait bon se laisser vivre de cette vie presque exclusivement végétative, où le corps est l’objet de mille petites attentions et où l’esprit tranquille et léger, ne se fatigue pas à la recherche de cette vaine gloriole du succès, qui occupe tant les hommes.

Il se soucie donc fort peu de ce que l’avenir lui réserve — son idéal étant la continuation, aussi longtemps que possible, du présent. Quant à embrasser une carrière, il n’y a, ma foi ! jamais songé et ne désire aucunement se torturer la cervelle avec une si scabreuse question.

Mais… quelle est la mer — si cachée qu’elle soit — que ne ride jamais le moindre souffle de vent ?