Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 2.djvu/333

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écarter Catherine, lui saisit rudement le bras de sa main. Nicolas, l’œil étincelant, le saisit lui-même au collet. Au même instant, on entendit tomber à l’étage supérieur, avec une grande violence, un corps pesant, dont la chute fut suivie tout de suite d’un cri de terreur véritablement effrayant.

Ils s’arrêtèrent tous immobiles, se regardant les uns les autres. Un nouveau cri succéda au premier ; puis un bruit de pieds qui s’agitent avec empressement ; puis des voix perçantes qui s’écrient : « Il est mort ! »

« Arrière, misérables ! cria Nicolas à son tour, lâchant la bride au sentiment de colère qu’il avait contenu jusque-là. Si mon opinion ne me trompe pas, vous vous êtes pris dans vos propres filets. »

Il se précipite hors de la chambre, s’élance au haut de l’escalier, dans la direction du bruit qu’il avait entendu, perce à travers une foule de personnes qui encombraient une petite chambre à coucher, et trouve Bray raide mort sur le plancher. Sa fille était étendue sur son cadavre, qu’elle serrait dans ses bras.

« Comment cela s’est-il fait ? » cria-t-il en regardant autour de lui d’un œil égaré.

Plusieurs voix lui répondirent ensemble qu’on avait vu Bray, par la porte entr’ouverte, couché sur son fauteuil dans une position singulière et incommode ; qu’on lui avait adressé la parole à plusieurs reprises, sans obtenir de réponse ; qu’on l’avait supposé endormi, jusqu’à ce qu’enfin quelqu’un l’ayant secoué par le bras, il était tombé lourdement sur le plancher : on s’était alors aperçu qu’il était mort.

« Quel est le propriétaire de cette maison ? » dit précipitamment Nicolas.

On lui montra du doigt une femme âgée.

« Madame, lui dit-il en mettant un genou en terre, pour détacher doucement les bras de Madeleine de la masse inerte et sans vie à laquelle ils se tenaient enlacés, je représente les meilleurs amis de mademoiselle : sa servante ici présente le sait bien ; il faut que je l’arrache à cette scène affreuse. Voici ma sœur, vous pouvez lui confier ce précieux dépôt. Vous verrez sur ma carte mon nom et mon adresse, et vous recevrez de moi toutes les instructions nécessaires pour les arrangements qu’il faudra faire. Voyons ! écartez-vous tous ; au nom du ciel ! donnez-nous de l’air et de l’espace. »

Tout le monde se recula, non moins étonné de la vivacité et du ton impétueux du jeune homme que de l’événement inattendu qui troublait la maison. Nicolas, prenant dans ses bras