Page:Dickens - Vie et aventures de Martin Chuzzlewit, 1866, tome2.djvu/121

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de bonjour. Ça vous saisit tout à coup. Attendez un peu ! Je vais revenir. Je suis à vous. Mais je vois ici des gentlemen qui ne sont pas de ma connaissance. Sont-ils inscrits sur la liste de nos visiteurs ? »

Cette question se rapportait à certains pourceaux maigres et décharnés qui étaient entrés dans la hutte après lui et qui rôdaient sur les talons de la famille. Comme ils n’appartenaient point à l’habitation, ils furent chassés par les deux petits garçons.

« Je ne suis point superstitieux à l’endroit des crapauds, dit Mark, promenant son regard autour de la chambre ; mais, si vous pouviez engager deux ou trois de ces animaux, que je vois en votre compagnie, à prendre également le large, je crois, mes jeunes amis, qu’ils trouveraient le grand air plus rafraîchissant. Non que j’ai rien contre eux. Le crapaud est un joli petit animal, dit M. Tapley s’asseyant sur un tabouret ; bien moucheté, ressemblant assez par le gosier à un vieux gentleman ; il a les yeux brillants, la peau fraîche et polie, mais je crois que ses agréments gagneraient encore à être vus dehors. »

Tandis qu’il faisait semblant, par de pareils discours, de se trouver parfaitement à son aise et d’être l’homme du monde le plus indifférent, un véritable sans-souci, Mark Tapley continuait de promener son regard autour de lui. L’aspect blême et misérable de la famille : le changement qui s’était opéré chez la pauvre mère, cette enfant minée par la fièvre qu’elle tenait sur son sein, l’abattement complet et le peu d’espérance qu’on lisait sur tous les visages, étaient autant d’indices frappants pour Mark et produisaient une profonde impression sur son esprit. Il vit tout cela aussi clairement et aussi vite qu’il aperçut avec ses yeux corporels les planches grossières soutenues par des chevilles qui étaient enfoncées entre les troncs d’arbre dont la maison était composée ; dans un coin, le coffre à farine servant aussi de table ; les couvertures, les bêches et autres objets mobilier accrochés aux murs ; l’humidité qui couvrait le sol de moisissure, et une moisson de végétaux pourris dans chaque crevasse de la baraque.

« Comment se fait-il que vous soyez venu ici ? demanda l’homme quand le premier mouvement de surprise fut surmonté.

– Comment ? répondit Mark. Nous sommes arrivés hier au soir par le steamer. Notre intention est de faire vite et bien