Page:Dickens - Vie et aventures de Martin Chuzzlewit, 1866, tome2.djvu/125

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Et, en effet, le personnage entra. Son visage était aussi dur, aussi noueux que son bâton ; ses mains étaient comme son visage ; sa tête ressemblait à un vieux balai de cheminée noirci. Il s’assit sur le coffre avec son chapeau sur la tête ; puis, croisant les jambes et regardant Mark, il dit, sans retirer sa pipe de sa bouche :

« Eh bien, monsieur Co ! … Comment ça va-t-il, monsieur ? »

Il est nécessaire de faire connaître ici au lecteur que M. Tapley s’était gravement introduit sous ce nom auprès des étrangers.

« Très-bien, monsieur ; très-bien, dit-il.

– N’est-ce pas M. Chuzzlewit que je vois ? s’écria le visiteur. Comment ça va-t-il, monsieur ? »

Martin secoua la tête, et involontairement il ramena la couverture sur son visage ; car il avait senti qu’Hannibal allait cracher, et, comme dit la chanson, « il en avait mal au cœur par avance. »

« Ne prenez pas garde à moi, monsieur, dit M. Chollop d’un ton obligeant ; je suis à l’épreuve de la fièvre, et même de la fièvre intermittente.

– Mon motif était plus personnel, dit Martin se montrant de nouveau. J’avais peur que vous ne fussiez au moment de…

– Monsieur, répliqua M. Chollop, je puis calculer ma distance à un pouce près. »

Et aussitôt il le favorisa d’une démonstration de cette heureuse faculté.

« Monsieur, dit Hannibal, qu’on me donne seulement un but à deux pieds de distance en direction circulaire, et je m’engage à ne pas le dépasser. Je suis allé jusqu’à dix pieds, mais c’était un pari.

– J’espère que vous l’avez gagné, monsieur ? dit Mark.

– Mais certainement, monsieur. J’ai empoché l’enjeu. Oui, monsieur. »

L’américain garda quelque temps le silence, mais ce temps il l’employa activement à former un cercle magique autour du coffre sur lequel il était assis. Le cercle une fois complet, notre homme recommença à parler.

« Comment trouvez-vous notre pays, monsieur ? » demanda-t-il en regardant Martin.

Le malade répondit : « Je ne l’aime pas du tout. »

Chollop continua de fumer sans la moindre apparence d’é-