Page:Dickens - Vie et aventures de Martin Chuzzlewit, 1866, tome2.djvu/176

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Va, diligence, le long de toutes ces bâtisses de brique et de mortier ; roule sur le pavé raboteux qui met en péril l’équipage d’un siège léger sur l’impériale ! Yoho ! par des détours sans nombre et à travers un labyrinthe de rues, jusqu’à ce qu’on arrive enfin à une vieille cour d’auberge et que Tom mette pied à terre, tout étourdi et presque saisi de vertige.

Tom Pinch est à Londres !

« Cinq minutes avant l’heure ! … dit le cocher en recevant de Tom ses honoraires.

– Sur ma parole, dit Tom, ça ne m’aurait pas fait grand’chose, quand nous serions arrivés cinq heures après le terme ; car, à cette heure matinale je ne sais pas où aller ni que faire de moi.

– Est-ce qu’on ne vous attend pas ? demanda le cocher.

– Qui ? dit Tom.

– Eh bien, eux ! » répliqua le cocher.

Il s’était si bien mis dans l’idée que Tom était venu en ville pour y trouver un cercle nombreux de parents et d’amis impatients de le revoir, qu’il eût été très-difficile de le détromper. Tom ne l’essaya pas. Il éluda gaiement le sujet, et étant entré dans l’auberge, il ne tarda point à s’y endormir devant le feu, dans une des salles publiques ouvrant sur la cour. Lorsqu’il s’éveilla, tous les gens de la maison étaient en mouvement. Il se lava et répara le désordre de sa toilette, ce qui lui fit grand bien après le voyage ; et en entendant sonner huit heures, il sortit aussitôt pour aller voir son ancien ami John.

John Westlock demeurait à Furnival’s-Inn, High-Holborn : c’était à peine à un quart d’heure de là ; mais Tom trouva le trajet long, par la raison qu’il fit deux ou trois milles de trop en voulant prendre le plus court. Lorsque enfin il arriva en vue de la porte de John, qui logeait au deuxième étage, il s’arrêta tout ému, la main sur le marteau, et tremblant de la tête aux pieds. Ce qui agitait ses nerfs, c’était de penser qu’il allait être obligé de raconter ce qui s’était passé entre lui et Pecksniff, et il avait peur que John ne triomphât terriblement de cet événement.

« Cependant, il faut toujours qu’il le sache tôt ou tard pensa Tom ; et je ferai aussi bien de le lui dire tout de suite. »

Il frappa. Ran tan plan.

« J’ai peur, pensa-t-il, que ce ne soit pas comme ça qu’on frappe à Londres. Je n’aurai pas été assez hardiment ; c’est