Page:Dickens - Vie et aventures de Martin Chuzzlewit, 1866, tome2.djvu/287

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lard pencher sa tête blanche, et cacher son visage dans ses mains.

Son cœur en fut navré. Ce dernier témoignage de l’ancienne affection du vieillard, ce dernier débris de la tour, maintenant en ruines, qu’il avait vue se dresser jadis avec tant d’orgueil et d’espoir, aurait douloureusement ému le cœur de Martin, même alors qu’il était le plus égoïste et le plus insouciant. Mais, maintenant que ses défauts s’étaient transformés en bonnes qualités, maintenant qu’il voyait sous un jour tout différent son ami d’autrefois, le gardien de son enfance, courbé sous le poids des années et des afflictions, le ressentiment, l’opiniâtreté, l’amour-propre et l’orgueil, tout s’évanouit en présence des larmes qui sillonnaient les joues ridées de son aïeul. Il n’en pouvait supporter la vue ; il ne pouvait supporter la pensée qu’elles avaient coulé à son aspect ; il ne pouvait supporter d’y reconnaître le reflet d’un passé amer, irrévocable.

Il s’avançait rapidement pour saisir la main du vieillard, lorsque M. Pecksniff s’interposa entre eux.

« Non, jeune homme ! dit M. Pecksniff, se frappant la poitrine et étendant l’autre bras devant son hôte, comme une aile pour l’abriter. Non, monsieur ! Ne faites pas cela. Frappez ici, monsieur, ici ! C’est à moi qu’il faut lancer vos dards, s’il vous plaît, monsieur, non pas à lui !

– Grand-père ! s’écria Martin. Écoutez-moi ! Laissez-moi vous parler, je vous en conjure.

– Que je vous voie, monsieur ! que je vous voie ! dit M. Pecksniff, passant tour à tour de droite à gauche et de gauche à droite, de manière à se tenir toujours entre eux. N’est-ce pas assez, monsieur, que vous pénétriez dans ma maison comme un voleur au milieu de la nuit ; non, je me trompe (car on ne saurait être trop scrupuleux en fait de vérité), comme un voleur au milieu du jour, amenant avec vous vos compagnons de débauche, pour se planter le dos contre la porte, afin d’empêcher l’entrée et la sortie des personnes de ma famille ? » Mark en effet s’était emparé de cette position et n’en bougeait pas. « Oseriez-vous encore frapper la vertu vénérable ? L’oseriez-vous ? En ce cas, sachez qu’elle n’est pas sans défense ; j’en serai le bouclier, jeune homme. Attaquez-moi. Avancez, monsieur ! Allons ! feu !

– Pecksniff, dit le vieillard d’une voix faible, calmez-vous. Restez tranquille.

– Je ne puis être calme, s’écria M. Pecksniff, et je ne veux