Page:Dickens - Vie et aventures de Martin Chuzzlewit, 1866, tome2.djvu/305

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part, ces épaisses boucles de cheveux opulents… Je dois vous avoir aperçu, mon cher monsieur, dans la foule brillante du monde élégant. »

Tous s’accordèrent à dire que rien n’était plus probable.

« J’aurais souhaité, dit M. Pecksniff, d’avoir l’honneur de vous présenter à mon parent âgé qui demeure chez moi : à l’oncle de notre ami. M. Chuzzlewit, monsieur, aurait été fier de vous serrer la main.

– Est-ce que ce monsieur est ici en ce moment ? demanda Montague, qui devint très-rouge.

– Oui, dit M. Pecksniff.

– Vous ne m’en aviez rien dit, Chuzzlewit…

– Je ne pensais pas que cela pût vous intéresser, répondit Jonas. Vous n’auriez pas grand plaisir à faire connaissance avec lui, allez ; je vous en réponds !

– Jonas ! mon cher Jonas ! dit M. Pecksniff d’un ton de reproche. Vraiment…

– Quant à vous, vous avez vos raisons pour parler en sa faveur, dit Jonas. Vous l’avez cloué, rivé. Il vous en revient une fortune.

– Oh ! oh ! si c’est comme ça… s’écria M. Montague. Ha ! ha ! ha ! »

Et ils se mirent tous à rire, M. Pecksniff surtout.

« Non, non ! dit ce dernier, frappant gaiement sur l’épaule de son gendre. Il ne faut pas croire tout ce que vous dit mon jeune parent, M. Montague. Dans les affaires officielles, vous pouvez le croire et vous fier à lui ; mais il ne faut pas attacher d’importance aux écarts de son imagination.

– Sur mon âme, monsieur Pecksniff, s’écria Montague, j’attache la plus haute importance à sa dernière observation. J’espère bien que c’est vrai. On ne peut battre monnaie assez vite dans le cours ordinaire des choses, monsieur Pecksniff. Il n’y a rien de tel que d’élever l’édifice de sa fortune sur les faiblesses de l’humanité.

– Oh ! fi donc ! fi donc ! fi donc ! » s’écria M. Pecksniff.

Mais ils se mirent tous à rire de nouveau, M. Pecksniff surtout.

« Je vous donne ma parole d’honneur que nous ne faisons pas autrement, nous autres, dit Montague.

– Oh ! fi donc ! fi donc ! s’écria M. Pecksniff. Vous voulez plaisanter. Je suis sûr qu’il n’en est absolument rien. Comment cela se pourrait-il ? »