Page:Dickens - Vie et aventures de Martin Chuzzlewit, 1866, tome2.djvu/308

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- Une bien belle nuit avec beaucoup d’étoiles, dit M. Pecksniff en levant les yeux. Et les planètes, comme elles brillent ! Admirez… Ces deux individus qui étaient ici ce matin, ils ont quitté votre maison, j’espère, mistress Lupin ?

– Oui, monsieur. Ils sont partis.

– J’en suis charmé, dit M. Pecksniff. Admirez les merveilles du firmament, mistress Lupin ! Quelle splendeur dans cette scène ! Quand je lève les yeux vers ces astres resplendissants, il me semble toujours que chacun d’eux fait signe à l’autre d’observer les vanités que poursuivent les hommes. Ô mes semblables ! s’écria M. Pecksniff, hochant la tête avec compassion ; dans quelle erreur profonde vous êtes ! Ô mes périssables amis, vous vous abusez étrangement ! Les étoiles sont parfaitement satisfaites, je le suppose, dans leurs différentes sphères. Pourquoi ne l’êtes-vous pas aussi dans la vôtre ? Oh ! fi de vos efforts et de vos luttes pour vous enrichir, pour triompher les uns des autres, mes aveugles amis ! Levez plutôt les yeux vers le ciel, comme moi ! »

Mme Lupin secoua la tête et poussa un profond soupir. C’était si touchant !

« Levez plutôt les yeux vers le ciel, comme moi ! répéta M. Pecksniff en étendant la main ; comme moi, humble individu, qui ne suis qu’un insecte ainsi que vous-mêmes. L’argent, l’or et les pierres précieuses peuvent-ils étinceler comme ces constellations ? Je ne le pense pas. Alors ne soyez pas altérés d’argent, d’or ou de pierres précieuses ; mais levez plutôt les yeux vers le ciel, comme moi ! »

En disant ces mots, l’excellent homme caressa la main de Mme Lupin entre les siennes, comme pour ajouter : « Je vous recommande ce sujet de réflexion, ma bonne femme ! » Et il s’en alla dans une espèce d’extase ou de ravissement, en tenant son chapeau sous son bras.

Jonas était resté dans la même attitude où M. Pecksniff l’avait laissé, et il regardait son ami d’un air soucieux. Ce dernier, entouré de monceaux de documents, écrivait quelque chose sur un fragment de papier oblong.

« Alors, vous ne quitterez pas Salisbury avant deux jours d’ici ? dit Jonas.

– Vous avez entendu que nous nous sommes donné rendez-vous pour après-demain, répondit Montague sans lever les yeux. Dans tous les cas, j’aurais attendu, à cause de mon groom. »