Page:Dickens - Vie et aventures de Martin Chuzzlewit, 1866, tome2.djvu/371

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honneur, que, s’attendant à mourir, il avait écrit, quelque temps auparavant, cet aveu, et l’avait mis à mon adresse sous un pli cacheté, qu’il n’avait pu cependant se résoudre à déposer entre mes mains. En ce moment, je pense, il a ce papier sur sa poitrine. »

Le jeune homme toucha vivement la place désignée pour confirmer cette supposition.

« Vous ferez bien peut-être de nous le confier, dit John. Mais ne vous en inquiétez pas pour le moment. »

En parlant ainsi, il leva la main pour fixer l’attention de Martin. Déjà celui-ci contemplait très-sérieusement l’homme qui se trouvait devant lui et qui, après un court intervalle de silence, dit d’une voix basse, faible et creuse :

« Quelle parenté y avait-il entre M. Antony Chuzzlewit, qui…

– Qui est mort, dit Martin. Quelle parenté il y avait entre lui et moi ? Il était le frère de mon grand-père.

– J’ai peur qu’il ne soit mort…, assassiné.

– Grand Dieu ! dit Martin. Par qui ? »

Le jeune Lewsome leva les yeux sur lui, et, les baissant de nouveau, il répondit :

« J’ai peur… que ce ne soit par moi.

– Par vous ! … s’écria Martin.

– Non par mon fait, mais je le crains, par mon moyen.

– Parlez ! dit Martin ; la vérité, rien que la vérité !

– J’ai peur que ce ne soit là la vérité. »

Martin allait l’interrompre encore, quand John Westlock dit doucement :

« Laissez-le raconter son histoire à sa guise. »

Lewsome continua donc ainsi :

« J’ai suivi en qualité d’élève les cours de chirurgie ; dans les dernières années, j’ai servi comme aide un des premiers praticiens de la Cité. Tandis que je remplissais ces fonctions, je fis connaissance avec Jonas Chuzzlewit. C’est lui qui a été le principal auteur du meurtre.

– Qu’est-ce à dire ? demanda Martin d’un ton sévère. Savez-vous bien que Jonas est le fils du vieillard dont vous avez parlé ?

– Je le sais, » répondit Lewsome.

Un nouveau silence s’ensuivit ; puis le jeune homme reprit son récit au point où il avait été interrompu :

« Je n’ai que trop de raisons de le savoir, car je lui ai sou-