Page:Dickens - Vie et aventures de Martin Chuzzlewit, 1866, tome2.djvu/432

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valu pour vous. Vous pouviez bien garder votre secret sans me compromettre.

— Cent guinées, pour cinq minutes seulement dans la chambre voisine ! … Parlez ! … » s’écria Jonas avec désespoir.

Slyme prit la bourse. Jonas s’achemina d’un pas chancelant vers la porte de la cloison vitrée.

« Arrêtez ! lui cria Slyme, le saisissant par les pans de son habit. Je ne sais rien de rien ; et puis il faudra toujours bien que ça finisse par là. Êtes-vous coupable ?

— Oui ! dit Jonas.

— Les faits sont-ils conformes à ce qu’on vient d’exposer ?

— Oui ! dit Jonas.

— Voulez-vous… voulez-vous me promettre de… de dire une prière… ou quelque chose comme ça ? » demanda Slyme d’une voix émue.

Jonas le quitta brusquement sans rien répondre et ferma la porte.

Slyme se pencha et écouta par le trou de la serrure. Il se retira ensuite sur la pointe du pied aussi loin que possible, et regarda du côté de la chambre avec terreur. Il fut tiré de cet état de stupeur par l’arrivée de la voiture et le bruit du marchepied qu’on baissait.

« Il est en train de prendre quelques menus objets, dit-il en se penchant à la fenêtre et s’adressant aux deux hommes qui se tenaient en bas, à la lueur du réverbère. Que l’un de vous veille sur les derrières de la maison, pour la forme. »

L’un des deux hommes se dirigea vers la cour. L’autre, s’asseyant sur le marchepied de la voiture, continua la conversation avec Slyme, à la fenêtre. Slyme était son supérieur. Il avait dû sans doute son avancement à cet ancien penchant tant loué par la victime de Jonas, pour faire toujours le pied de grue au coin de la rue ; habitude précieuse dans sa profession actuelle.

« Où est-il ? » demanda l’agent.

Slyme jeta un coup d’œil rapide dans la chambre et secoua la tête comme pour dire :

« Il est tout près d’ici. Je le vois.

— Son compte est réglé, dit l’homme.

— Et solidement, » dit Slyme.

Ils se regardèrent l’un l’autre, puis regardèrent la rue du haut en bas. L’homme qui était assis sur le marchepied ôta son chapeau, puis le remit sur sa tête et sifflota.