Page:Dickens - Vie et aventures de Martin Chuzzlewit, 1866, tome2.djvu/482

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reflètent dans les tiens. Et il y a une créature délicate, son enfant (pas l’enfant de Ruth), que tes yeux suivent dans ses jeux et sa danse, et qui, s’étonnant parfois de te voir la regarder tout pensif, s’élance pour grimper sur tes genoux et appuyer sa joue contre la tienne ; une enfant qui t’aime, Tom, encore plus que ne fait tout le monde, si c’est possible, et qui, une fois étant tombée malade, te choisit pour lui donner des soins, sans témoigner jamais le moindre signe d’impatience, Tom, tant que tu étais assis à son chevet.

Maintenant, voici que tu passes à un ton plus grave : c’est un chant consacré aux anciens amis et aux temps écoulés ; et, tandis que tu presses lentement les touches, tandis que l’harmonie enfle moelleusement ses accents, ces amis du passé et ces jours qui ne sont plus montent devant toi. Le fantôme de ce vieillard qui aimait à prévenir tes besoins, et qui jamais ne cessa de t’honorer, est là parmi les autres ; il te répète, avec un visage calme, recueilli, les paroles qu’il t’adressa sur son lit de mort en te bénissant !

Et du fond du jardin arrive, jonchée de fleurs de la main des enfants, ta petite sœur Ruth, le pied et le cœur aussi légers qu’au temps jadis ; elle s’assied à côté de toi. Du Présent et du Passé, où Ruth est si tendrement enlacée à toutes tes pensées, ton chant s’élance vers l’Avenir. Et, pendant qu’elle vibre en toi comme autour de toi, la noble musique, vous roulant ensemble dans ses flots d’harmonie, vous dérobe le triste spectacle de votre séparation terrestre, en vous ravissant tous deux en extase dans les cieux.



FIN.