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DEP

Le P. du Cerceau a fait entrer ce mot Latin dans une Epitre Françoise adressée à M. Poncet de la Rivière, Evêque d’Angers.

DÉPROMETTRE. (Se) Désespérer d’une affaire, du succès de laquelle on se flattoit. Dans la Comédie des Ménechmes de M. Regnard, Démophon, voulant marier sa fille Isabelle, dit à la tante :

Je me suis bien promis qu’en faveur de l’affaire,
Vous feriez de vos biens donation entière,
Vous gardant l’usufruit jusques à votre mort.

Araminte répond :

Jusqu’à ma mort ! Vraiment, ce projet me plaît fort !
Vous vous êtes promis, il faut vous dépromettre.

Dépromettre, signifie aussi, se dédire, ne pas tenir sa parole. Il est dans le Dictionnaire Comique. Il n’en vaut pas mieux.

DÉPROPRIEMENT. s. m. Est un terme dont on use dans l’Ordre de Malte, pour signifier le testament des Chevaliers, ou du Grand-Maître.

☞ DESPAN. (Selon quelques cartes Depecan,) ville d’Ethiopie, située sur une colline de l’Abissinie, à trois milles du lac de Dempée.

DEPSER. v. a. Vieux mot. Parer ou fouler les draps. Il vient du Grec δέψα, qui veut dire, peau, selon Snidas, ou du verbe δεψέω, j’amollis, à la maniere de ceux qui amollissent le cuir.

DÉPUCELAGE. s. m. Défloration, action par laquelle on ôte la virginité à une fille. Devirginatio. Dans la Traduction des Métamorphoses d’Ovide, imprimée in-16. à Paris l’an 1549. sous le titre du Grand Olympe, il y a fol. 57. verso une sable intitulée : Le dépucelage de Sémélé fait par Jupiter. Ce terme a été aussi employé par Montagne, l. 3. c. 5. p. 27. du 3 t. de l’édition in-12. Paris, 1659. Zenon, dit-il, parmi ses loix, régloit aussi les escarquillemens, & les secousses du dépucelage. Cotgrave, le seul qui ait mis ce mot dans son Dictionnaire, a écrit despucelage. Ce mot n’est plus udre.

DÉPUCELLEMENT. s. m. L’action de dépuceller. Le dépucellement étoit autrefois un droit Seigneurial dans certains pays. La dépucelée ne se faisoit point une honte de son dépucellement.

DÉPUCELER, v. a. Il dépucelle, il dépucellera, il a dépucelé. Oter le pucelage. Delibare, deflorare, devirginare. Les Anciens avoient tant de respect pour les vierges, qu’on ne les faisoit point mourir, sans les avoir fait dépuceler. Ceux de la côte de Malabar paient les étrangers pour venir dépuceler leurs femmes. Chez les Ecossois c’étoit un droit des Seigneurs de dépuceler la nouvelle mariée, droit qui leur fut accordé par Evénus leur Roi, & qui leur fut ôté par Malcome, qui permit qu’on s’en rachetât pour un certain prix qu’on appeloit marcheta, ou un certain nombre de vaches par allusion au mot de march, qui signifioit chez eux un cheval : Buchanan dit aussi, qu’on s’en rachetoit pour un demi-marc d’argent, qu’on appeloit marchette. Cela a lieu aussi dans la Flandre, dans la Frise, & en quelques lieux d’Allemagne. Par la coutume d’Anjou & du Maine, une fille après 15 ans se peut faire dépuceler, sans pouvoir être exhérédée par son père. Du Cange cite un Arrêt du 19. Mars 1409. obtenu par les habitans d’Abbeville contre l’Evêque d’Amiens, qui faisoit racheter par une certaine somme d’argent la défense qu’il avoir faite de dépuceler les nouvelles mariées les trois premières nuits de leurs noces : ce qui étoit fondé sur le IV. Concile de Carthage qui l’avoit ordonné pour la révérence de la bénédiction matrimoniale.

Dépuceler, se dit aussi en parlant des choses qu’on fait la première fois. Cet Avocat a plaidé sa première cause, le voilà dépucelé. Il est du style familier & de conversation seulement.

Dépucelé, ée. part. pass. & adj.

DEPUIS. Préposition qui régit l’accusatif, & qui se dit du temps, du lieu, & de l’ordre ; a, ab, e, ex. Depuis le lever du soleil jusqu’à la nuit, les troupes de Darius ne cessèrent de défiler. Vaug. La France s’étend depuis le Rhin jusqu’aux Pyrénées. Dans cette dernière phrase, & dans plusieurs autres semblables, depuis est proposition d’énumération & d’ordre.

Depuis, est aussi adverbe, mais il ne se dit que du temps. Ex eo tempore. Cela s’est passé depuis. Ab. On a remarqué qu’il n’y a point de mot qui se soit tant opiniâtré pour s’établir, ni qui ait été tant rebuté, que du depuis. Le bon usage l’a enfin banni, soit comme adverbe, soit comme préposition. Vaug. Observez encore que depuis ne se doit point mettre après un prétérit indéfini. Depuis que nous vous eûmes quitté, il arriva. Il faut dire, après que nous vous eûmes quitté. Corn.

Depuis, se joint quelquefois avec peu, & fait une espèce d’adverbe qui signifie, il n’y a pas long-temps. Non ita pridem. Un courier est arrivé depuis peu. Il se joint quelquefois avec quand, & est encore une espèce d’adverbe, qui signifie, depuis quel temps. Depuis quand avez vous les yeux de Vénus ? Ex quo. Voit. Depuis se joint quelquefois avec que, & alors il ne se dit que du temps, & est une espèce de conjonction. Ex quo. Je n’ai employé mes yeux à aucun usage qu’à pleurer sans cesse, depuis que j’ai appris que vous étiez résolu à un éloignement. Let. Portug. Mais, quand depuis est conjonction, il ne faut jamais mettre à l’infinitif le verbe qui le suit. C’est une faute dans laquelle est tombé M. l’Abbé Dubois dans sa Traduction des Offices de Cicéron. Panétius a traité très-exactement toute la matière des Devoirs en trois livres. Possidonius son disciple, dit que depuis avoir publié ces trois livres, il a encore vécu trente ans. Il falloit dire, après avoir publié.

☞ On ne doit point employer depuis pour quand, pour dès-là que, lorsque. Ce mot dénote toujours un temps passé. Il n’y a point d’exception à cette régle.

DÉPURATION. s. f. Clarification, dégagement de toute la lie, des ordures excrémenteuses, qui embarrassent un corps, de toutes ses parties les plus grossières & les plus crasses. Harris. Defecatio, fecis & sordium, partium crassiorum purgatio ; Depuratio. La dépuration du sang. L’idée attachée jusqu’ici au terme de dépuration, ne vient que d’un mal entendu. On a cru sans fondement que le sang étoit une liqueur impure. Un Auteur moderne s’efforce de prouver le contraire par plusieurs raisons tirées de l’œconomie animale, entr’autres par l’extrême petitesse des orifices des veines lactées, qui ne permet pas que rien d’impur puisse y entrer, & passer dans le sang avec le chyle. Jour. des Sc.

Dépuration, se dit particulièrement en Pharmacie, des sucs des fruits & des plantes, & signifie la même chose que défécation. Voyez Dépuré, Défécation & Décantation.

DÉPURATOIRE. adj. de t. g. Il y a des gales qui ne se guérissent qu’avec danger par le soufre : ce sont celles qu’on appelle dépuratoires, c’est-à-dire, qui servent à dépurer la masse du sang ; au lieu qu’il y en a d’autres dont l’effet est de corrompre cette même masse. Journ. des Sav. Sept. 1731.

DÉPURER. v. a. Terme de Médecine & de Chimie. Purgare, defecare, fecibus exuere. La fermentation sert à dépurer une liqueur. De l’esprit-de-vin bien dépuré. On dépure un sirop, un suc, en le passant dans la chausse.

Dépuré, ée. part. & adj. Purgatus, defecatus. On appelle sucs dépurés, des sucs clarifiés d’eux-mêmes par résidence, c’est-à-dire, dont les fèces se sont séparées & précipitées au fond du vaisseau, en les laissant reposer après les avoir exprimées. Ensuite on les verse par inclination. Ce mot peut aussi s’appliquer à toutes sortes de liquides & au sang.

DÉPUTATION. s. f. Envoi de quelques personnes choisies dans un Corps vers un Prince, ou une Assemblée, pour traiter en son nom de ses affaires. Legatio. Les députations se font plus ou moins solennelles selon la qualité des personnes à qui on les envoie.