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DES

chez ceux qui croient l’être ; en sorte que le mot dessert, plus propre & plus étendu pour signifier ce dernier service, parce que l’on y sert autre chose que du fruit, est absolument banni du grand monde.

☞ Un ancien proverbe dit, entre Pâque & la Pentecoûte, le dessert est une croûte, parce que dans ce temps-là on manque de fruits.

DESSERTE. s. f. Ce qu’on ôte de dessus la table d’un grand Seigneur. Mensarum reliquiæ. On porte à ce qu’on appelle le cerdeau, la desserte de la table du Roi.

Desserte, en Jurisprudence, signifie l’action de desservir une Charge, ou un Bénéfice, l’acquittement qui se fait du service d’une Cure, d’une Chapelle, ou autre Bénéfice, un Ecclésiastique commis à la place du Titulaire. Functio alicujus muneris. La desserte de cette Charge est facile, elle n’occupe que deux heures par jour. Un Archidiacre est obligé de veiller à la desserte d’une Cure vacante, ou litigieuse. On adjuge une partie des fruits à celui qui fait la desserte d’un Bénéfice.

Desserte, dans le vieux langage, signifie, mérite. Merita. Marot s’en est servi dans la traduction des Pseaumes : & Cretin, ancien Poëte, dit :

Très-bon loyer aurez de vos dessertes.

Desserter. Terme d’Agriculture, Voy. Dessarter.

☞ DESSERTIR, v. a. Terme de Metteur-en-œuvre. C’est avec un burin, couper la sertissure d’une pierre un peu au-dessous du feuilletis, pour pouvoir la tirer de son œuvre sans danger.

DESSERVANT. s. m. Celui qui dessert un Bénéfice, qui en fait les fonctions à la place du Titulaire. Beneficium administrans. Ce Curé est en fuite, on a mis un Desservant à sa place.

DESSERVICE. s. m. Mauvais office qu’on rend à quelqu’un. Offensio. Quand on découvre le secret de son ami, on lui rend un grand desservice. L’Académie, après avoir mis ce mot dans la table de son Dictionnaire, le fait effacer de ses additions : ce qui est une marque qu’elle le désapprouve. Mézerai l’a employé. Il m’a rendu des signalés desservices. Pomey.

DESSERVIR. v. a. Rendre le service dû à quelque Charge, ou Bénéfice. S’acquitter des fonctions qui y sont indispensablement attachées. Fungi aliquo munere. Les Titulaires des Bénéfices simples y entretiennent des Chapelains pour les desservir. On ne condamne guère à la restitution des fruits ceux qui ont desservi les Cures effectivement. Un tel a été commis pour desservir la Cure pendant l’absence du Curé.

Desservir, signifie aussi, ôter de dessus la table un service, lever les plats. Fercula de mensâ tollere, removere, auferre mensam. On a desservi les potages, on est au rôt. On a desservi absolument, c’est-à-dire, on a ôté le couvert, la nappe.

Desservir, signifie aussi, rendre de mauvais offices à quelqu’un. Malè mereri de aliquo. Son Rapporteur, au lieu de le servir, l’a fort desservi, lui a nui beaucoup. Il a fait tout ce qu’il a pu pour me desservir auprès de mon protecteur. Le fourbe a desservi mes feux. Mol. Ce mot de desservir, pris dans cette dernière signification, paroissoit au P. Bouhours un assez méchant mot.

Desservi, ie. part.

DESSERVITORERIE. s. f. Terme usité dans quelques chapitres, pour exprimer un Office ou Bénéfice qui oblige à desservir une Eglise, à desservir un Chœur. Deservientis officium, vel beneficium. Ce titre & ces fonctions hors du chœur, ne sont que l’accessoire & une annexe de la desservitorerie au chœur. Bronod. Mém. pour le Chap. de S. Germ. l’Auxer. Ces sortes de desservitoreries sont constamment amovibles pour cause d’absence. Id. Une desservitorerie au chœur. Id. Ces Chapelles sont de la nature & de la condition des desservitoreries au chœur, ou bénéfices affectés aux Chantres & Choristes. Id.

DESSEURANCHE. Vieux mot, qui signifie séparation, dissolution, action de séparer. Dissolutio, separatio. Il rend moult bien la desseuranche. De Baum.

Ce mot & les deux suivans viennent de sevrer, qui a été dit dans la suite pour dessevrer & desseurer.

DESSEURE. Vieux mot dont on s’est servi pour dire, dessous.

DESSEUREMENT. s. m. Ce mot est hors d’usage, & il a la même signification que desseuranche. Quand aucun pourcache le desseurement de sa femme pour che que il l’a trouvé en péché de fornication. De Beaum.

DESSEURER, & DESSEUVRER. Dans la suite on a dit dessevrer. v. a. Séparer, dissoudre. Separare, dissolvere. Après que le mariage est desseuvré. De Beaum. Mal chose seroit qu’on desseuvrast les mariages. Id. Desseuvrer la compagnie. Id.

DESSICCATIF, ive. adj. Terme de Médecine, de Chirurgie, de Pharmacie. Qui a la propriété de dessécher. Siccandi, exsiccandi vi præditus. Un onguent dessiccatif. La pimprenelle passe pour être détersive, dessiccative & vulnéraire. Lemery. Cet Auteur écrit désiccatif par une seule s, ce qui est contraire à la prononciation de ce mot, dont l’s doit avoir un son rude & siflant, ce qui n’est pas quand cette lettre est seule entre deux voyelles. Quelques-uns écrivent dessicatif avec un seul c. L’usage est pour dessiccatif.

En peinture, on appelle huiles dessiccatives certaines huiles propres à faire sécher les couleurs.

DESSICATION. s. f. & mieux Désication. Terme de Chymie & de Pharmacie. Opération qui consiste à enlever à des substances solides l’humidité qu’elles contiennent, laquelle est étrangère à leur mixtion. Siccatio, exsiccatio. Un corps étranger formé dans l’estomac d’une personne qui avoit pris les eaux de Forges, formé, dis-je, par des sels que contiennent ces eaux, incorporées avec des matières glaireuses, ayant été porté quelques jours dans la poche, devint beaucoup plus léger & un peu moins gros par la dessication de l’humidité. Mém. de Trév. 1714. p. 141. La dessication est l’évaporation de l’humidité superflue, qui se trouve dans un corps. Harris.

☞ La déssication se fait par le moyen de la chaleur, ainsi que la déflegmation. La premiere se dit des matières consistantes ; la seconde des liqueurs.

DESSILLER. v. a. De bons Auteurs écrivent déciller, & c’est ainsi en effet qu’il faudroit écrire, ce mot venant de cil, mais l’usage est pour dessiller. Il signifie, ouvrir les yeux. Aperire oculos. Ce malade est si assoupi, qu’à peine a-t-il pu dessiller les yeux, dessiler les paupières.

Dessiller, se dit figurément des yeux de l’esprit, & signifie détromper, faire sentir à quelqu’un une vérité qu’il n’appercevoit pas. On a enfin dessillé les yeux de cet Hérétique, il a reconnu la vérité.

Et vous, Vérité sainte, en ces lieux descendue,
Eclairez l’univers, & par des traits vainqueurs,
Dessillez tous les yeux, pénétrez tous les cœurs.

Nouv. ch. de Vers.

Dessillé, ée. part. Quand la mort abat la plus florissante jeunesse, alors, les yeux dessillés, nous appercevons la vanité des attraits du monde. P. Gail.

☞ DESSINATEUR. s. m. C’est en général celui qui sait imiter par des traits les formes des objets que la nature nous présente, ou qu’il imagine. Delineandi, adumbrandi peritus. Un Peintre doit être un grand Dessinateur.

☞ En Architecture, Dessinateur est celui qui dessine & met au net les plans, les profils & élévations des bâtimens.

On appelle aussi Dessinateur, celui qui fait des ornemens pour diverses sortes d’ouvrages, qui donne des desseins pour les décorations qui servent aux pompes funèbres & autres.