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ce que le levain fait à la pâte. 2o. par la chaleur de l’estomac, des viscères du bas-ventre, & même des excrémens : cette chaleur produit dans les alimens à-peu près les mêmes effets, que le fumier produit dans les matières que les Chimistes y mettent en digestion. 3o. par les restes des alimens qui sont demeurés dans des rides de l’estomac, & qui s’y sont aigris. 4o. par la compression des muscles de l’abdomen, & du diaphragme. 5o. par la liqueur que la compression réitérée de ces muscles fait suinter des glandes de l’estomac. 6o, selon quelques Médecins modernes, par l’air même qui, étant embarrassé dans les alimens, se dilate par la chaleur de l’estomac, & sépare les parties des alimens. Toutes ces causes atténuent & divisent tellement les alimens, qu’ils se changent en une matière cendrée, qu’on appelle chyle. De l’estomac, le chyle descend dans l’intestin duodénum, où il est perfectionné par le suc pancréatique & par la bile, qui le rendent plus coulant, l’atténuent, & servent à précipiter ses parties grossières. Le chyle, ainsi perfectionné & atténué, entre dans les veines lactées qui le portent dans le réservoir de Pecquet, où il est délayé par la lymphe qui y vient en assez grande quantité ; puis il monte dans le canal thorachique, & entre dans la veine souclavière, d’où il est conduit dans le ventricule droit du cœur, par la veine cave ascendante.

Le chyle en se mêlant au sang, en ralentit le mouvement, en embarrasse les parties & les esprits, ce qui fait qu’on a envie de dormir après le repas, lorsque la digestion se fait : mais aussi le sang communique au chyle de son mouvement, &, par ses parties volatiles, & exaltées jointes aux parties salines & nitreuses de l’air, il le subtilise, & lui donne sa dernière perfection. Alors la digestion est accomplie, & les alimens, devenus par tant de changemens la matière prochaine de la nutrition, sont portés par le sang dans toutes les parties du corps, pour réparer & remplacer celles qui se dissipent continuellement, ou même pour en ajouter de nouvelles.

A l’égard das parties grossières des alimens qui ont été séparées du chyle par la bile & par le suc pancréatique, elles prennent de la bile la couleur qu’ont les excrémens, & cette odeur forte qui leur vient des soufres grossiers qu’elle y excite : ces soufres & les sels des excrémens servent, lorsqu’après avoir passé par tous les intestins, ils sont arrivés au dernier, qui est le rectum, à picoter les muscles de ce boyau, à les disposer à se relâcher, & à avertir par-là que la nature a besoin de se décharger des matières superflues.

La séparation de l’urine d’avec le sang peut être regardée comme une partie ou une perfection de la digestion, puisque cette séparation ne se fait que pour rendre 1 « sang plus pur, plus balsamique, & par conséquent plus propre à la nutrition, que les sels dont l’urine est chargée empêcheroient. Cette séparation de l’urine d’avec le sang se fait ainsi. Les rameaux de l’artère émulgente, qui se terminent aux glandes dont la substance des reins est composée, y portent le sang : la sérosité du sang est séparée de ce fluide par le moyen des pores des glandes des reins ; ces pores étant comme les trous d’un crible, qui ne laissent parler que les choses qui ont un plus petit diamètre qu’eux, ou une figure semblable à la leur, & un diamètre égal. Cette sérosité, qu’on appelle urine, est déchargée dans plusieurs petits tuyaux, qui se réunissant en forme de pyramides, la distillent dans le bassinet, d’où elle coule par les uretères dans la vessie.

☞ On dit figurément & familièrement qu’un mauvais traitement, qu’une réprimande, qu’un affront est de dure digestion, difficile à supporter. Durus, acerbus. On dit la même chose d’un ouvrage d’esprit, d’une entreprise, &c. pour dire, qu’ils sont difficiles, pénibles. Arduus, operosus.

Digestion en termes de Chymle, se dit d’une opération chymique, par laquelle certaines substances mêlées ensemble sont préparées, par une fermentation lente, à une dissolution parfaite. Mettre des plantes en digestion.

On confond souvent ce mot avec macération : mais ces deux choses diffèrent, en ce qu’il faut de la chaleur pour la digestion, & que la macération se fait à froid. La digestion se fait pour l’ordinaire avec addition de quelque menstrue convenable à la matière. On met en digestion des roses, des têtes de pavots dans l’huile ou dans de l’eau, pour en faire des onguens & des syrops. On met en digestion le plomb calciné, la céruse, dans du vinaigre distilé, pour les dissoudre, & en faire le magistère ou sel de Saturne. La digestion se fait tant des plantes que des minéraux, & même des métaux.

☞ La digestion diffère aussi de la circulation & de l’infusion. Voy. ces mots.

Digestion, se dit, dans les plantes comme dans les animaux, de la sève qui leur sert de nourriture bien préparée & digérée. Voyez Sève & Sucs, Végétation.

Digestion. Terme de Chirurgie. On le dit des apostêmes, des abscès, &c. pour marquer leur disposition à mûrir, à venir à suppuration. Les tumeurs qui viennent aux parotides des enfans, sont faites d’une humeur douce & de facile digestion : elles se murissent en peu de temps. Dionis.

DIGESTOIRE. s. m. Nom qu’on a donné à la machine de Papin. Voyez Digesteur.

DIGITALE. s. f. Digitalis. Plante dont la fleur représente un doigtier. La Digitale ordinaire, digitalis purpurea, a ses racines menues, fibreuses, brunes & très-amères. Elles poussent quelques feuilles pareilles à celles du Bouillon blanc, moins cotonneuses, couvertes d’un poil grisâtre. La tige qui s’éleve d’entre ces premières feuilles est haute de quatre à cinq pieds, arrondie, velue, garnie de quelques feuilles alternes, un peu plus petites que celles du bas, & qui vont en diminuant à mesure qu’elles approchent de l’extrémité de la tige, qui est inclinée & chargée de fleurs disposées en épi & penchées. Elles sont d’une seule pièce, ouvertes par leurs deux bouts ; terminées par des lèvres à l’ouverture supérieure, & enfilées à leur partie inférieure par un pistil qui devient un fruit arrondi, divisé en deux loges qui contiennent plusieurs semences. La couleur de ces fleurs est ordinairement purpurine, tachées en dedans de quelques pointes d’un rouge foncé ; rarement les trouvera-t-on toutes blanches. Il y a d’autres digitales qui diffèrent de celle-ci par leurs feuilles & par leurs fleurs. La Digitale croît dans les pays froids : on la dit bonne pour les écrouelles, & on assure qu’elle est vomitive & purgative. On l’estime encore pour l’épilepsie. On range parmi les Digitales la Gratiole, autre plante purgative & vomitive. Voyez Gratiole.

☞ DIGITATION. s. f. Terme d’Anatomie, qui sert à exprimer la manière dont deux muscles dentelés par les extrémités opposées, s’endentent l’un dans l’autre. Digitatio.

☞ On se sert aussi de ce mot, en Botanique, pour exprimer la découpure des feuilles. Voy. Digité.

☞ DIGITÉ. adj. Terme de Botanique, digitatus, coupé en forme de doigs, ou échancré par digitations. Feuilles digitées. Folia digitata, digitatim disposita ; &, suivant le nombre des digitations, on dit binata, ternata, &c.

DIGLATH, & Diglito. Nom du Tibre dans les lieux où il ne roule pas encore ses eaux avec rapidité. Voy. le Dict. de la Martinière.

DIGLYPHE. s. m. Qui a deux gravures. Diglyphus, triglyphus imperfectus. C’est un triglyphe imparfait, ou une console, ou corbeau qui a deux gravures.

DIGNAN. Ville d’Italie dans l’Istrie. Elle est aux Vénitiens, à qui elle se soumit en 1331.

DIGNE. adj. m. & f. Qui mérite quelque chose, soit en bien, soit en mal. Dignus. Seigneur, je ne suis