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Grèce. — Plusieurs mois servent à désigner la frise : Ç<ivY) ’, StâÇto[jia^, xosfxo^ôpoç^, Çiootpôpoç*. Les deux pre- miers font image ; les deux autres spécifient le type de décoration. La frise est dite cosmop/iore quand elle ne comporte qu’un décor purement ornemental, une suite de motifs courants tels que rinceaux et palmettes ;

oop/iure quand elle s’anime de figures vivantes, dieux,

hommes ou animaux. C’est Vitruve qui nous fait con- naître ce dernier terme, sous les formes latinisées de sophorus’^ et :ophoruin^. Mais les architectes romains l’avaient emprunté à leurs maîtres hellénistiques ; et déjà dans les comptes de construction de l’Érechtheion, au lyo siècle, l’expression ta Çàiia désigne les reliefs de la frisée D’autre part, en lisant Vitruve, on se rend compte de certaines variations qu’a subies au cours des temps le sens du mot sophoros ; on n’en trouve aucune application aux métopes sculptées de la frise dorique* ; il est exclusivement réservé à la frise ionique ; telle était sans doute la tradition alexandrine. Fuis, par extension du sens primitif, il avait Uni par désigner d’une façon générale toute frise d’entablement ionique, même dépourvue de sculptures’.

Frise dorique et frise ionique. Caractère inorganique du zophoros. — Deux caractères distinguent la frise ionique de la frise dorique. 1° Tandis que la frise dorique reste assujettie au rythme alterné de saillies et de retraits, qui sont les triglyphes et les métopes [metopae], la frise ionique forme une bande continue, sur laquelle des suites de ligures peuvent se développer sans interruption. 2° Tandis que l’on ne connaît pas d’exemple d’un ordre purement dorique sans frise, la frise ne constitue pas un membre essentiel et primordial de l’entablement ionique. Seuls deux éléments, l’archi- trave et la corniche, sont communs à tous les profils de cet entablement. Aussi bien, si tout s’explique ici, comme dans l’ordre dorique, par une imitation des anciennes constructions en bois et par l’interprétation directe d’un système de charpenterie, l’élément corres- pondant au triglyphe est le denticule, supprimé par l’architecture attique ; celui-ci remplace, en effet, les têtes de solives équarries qui reposaient sur l’architrave et le débordaient. Ce serait donc la zone des denticules, immédiatement sous la corniche, qu’il faudrait consi- dérer comme le type primitif de la frise ionique ’". Ce qui est certain, c’est que le cophoros fait défaut dans

I Pau3. V, 10, 3, à propos du lemple de Zeus à Olympie. — 2 Allien. 205 c ; cf.Plul. Per. 13.3.— 3 Haussoullicrdaus i(eiiue depMuloijie. 1»9S, p. 45, inscr. provenaut du temple d’Apollon Didyméen, ii* s. avant notre ère ; cf. Ferrol- Chipiez, Uiit. de lart dans tant. VU, 1898, p. 672. — ’ Diod. Sic. XVIII, »6, p. 278, emploie l’expression i ;tvaxa ; ^^.t^d^o^ ; â propos de la décoration intérieure d’un péristyle ioDi<(ue (funérailles d’Alexandre le (irand). — ^ Vitruv. 111, 6, 17 et 33. — « Jbid. IV, 8, 7 ; V, I, IC. — C. inscr. ail. I, 32i, I. 4S ; cf. Mi- chaelis dans Ât/ien. Mitlh. XIV, p. 357 et Collignon, Hist. de la sculpt. gr. II, p. 94. — » Cf. Vilruv. IV, 3, ît cl 23 : .. supra cpislylium Iriglyphi cuni suis melopis », et m, 6, 17, à propos de l’ordre ionique :’« zopliorus supra cpistylium v.

— 9 Vilrure, III, 0, 17 cl l», distiufrue le zophorus sculpté et le zopliorus sans sculpture. — 10 Choisy, Hist. de iarcliitecture. I. p. 338, lîç. 3 cl p. 339, d’après les théories de Dieulaioy. Voir comme type le tombeau lycicn d’Anliplicllos, rcppoduil dans Durm, Die Bnukunst d. Griecla-n, 2- éd. IS’Jl, p. 235. lig. 154.

— Il Choisy, op. cit. I, p. 341 ; Perrot-Chipicz, op. cil. Vil. p. 044 ; Lechat, Le temple grec, 1902, p. 93, 9r,. ^ 12 De même à l’Iléraion de Samos.

— 13 Perrol-Chipiez, op. cil. V, p. 3Ci sq. ; voir aussi le tombeau de Tcr- messos dans Lanckoronski, Les liltes de la Paviphylie et de la Pisidie, II. 1893, p. 68, fig. 17. — li l’orlii(uc des Caryatides à l’Érechtheiou (lin du v> s.l, Léonidaion dOlympic (milieu du iv- s.), portique du grand autel de Pergame (première moitié du ii* s.i ; Asclépieion de r*riène, cf. Wiegand- Schrader, Priene, p. 143 et fig. 113, 116, HT. Il y a discussion pour le temple d’Alhèna Polias à Priène ; Wiegand-Schrader, op. cit. (ig. 67, 68, 71, 72 et

IX.

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l’ionique primitif d’Asie Mineure, pays oi !i cet ordre a pris naissance ". A l’Artémision archaïque d’Éphèse, on n’a pas retrouvé de traces d’un cophoros dans l’entable- ment de la colonnade’^ ; et les tombeaux rupestres de Lycie, qui conservent au v« siècle les formes archaïques de l’ordre, ne présentent pas de frise (fig. 1762, 24fli, 6317, 6318, 6762) ’^ La tradition de l’entablement archi- trave, c’est-à-dire sans frise, survit, à l’époque classique, dans quelques monuments d’Athènes (fig. 1203), d’Olympie, de Pergame, de Priène ’*, peut-être aussi dans le Mausolée d’Halicarnasse ’^ ; mais à partir du v« siècle, le type normal de l’ionique comporte un entablement complet, avec zophoros.

Origine du zophoros. — Puisque la frise n’est pas un élément organique de l’ordre, quelle peut être l’origine de cette bande purement décorative ? On serait tenté de la rechercher encore dans les pratiques de l’architec- ture en bois et de voir dans le zophoros un souvenir des revêtements en métal ou en terre cuite, ornés de motifs et de figures en relief, que l’on appliquait sur les poutres de l’entablement pour en assurer la conservation ; mais cette hypothèse, plausible en particulier pour l’archi- trave historiée du temple d’Assos", ne saurait expliquer le rôle complexe du zophoros avant la fixation de sa place canonique. Remonter à l’architecture mycénienne et aux frises coloriées qui couraient à la partie supé- rieure des murs du mégaron ", c’est seulement reculer la solution du problème ; quant aux frises d’albâtre découvertes à Tirynlhe, elles jouaient plutôt le rôle de métopes et intéressent surtout les origines de la frise dorique’*. En tant que bande continue et historiée, le zophoros dérive d’un autre principi ! d’ornementation, que l’ionisme paraît avoir emprunté simultanément à l’Egypte et à l’Asie antérieure ". Il semble procéder, en effet, d’un type de décoration murale familier aux Égyptiens, qui se plaisaient à développer sur le granit de leurs temples et de leurs tombeaux d’étroites et longues bandes horizontales, illustrées tantôt de pein- tures, tantôt de gravures au champlevé, tantôt de bas- reliefs, et manifestement inspirées des rouleaux de papyrus^". Les rapports très anciens de l’.^natolie occidentale avec l’Egypte, la présence de nombreux Ioniens et Éoliens sur les bords du Nil dès le vu’ siècle, avant tous autres Grecs, enfin les divers témoi- gnages d’une influence de l’art égyptien sur l’ionisme -’

pi. XI, n’admettent pas de frise ; mais cf. Wilbeig dans Alhen.- .Uillh. XXXIX, 1914, critiqué par Lethaby dans Journal uf hell. studiva, 1916, p. 33-33. — 15 Voir le nouvel essai de restauration que donne Niemann dans Vien.Jaltreshefte,l, 1908, Beibt. col. 205-206, avec entablement architrave et frise reportée sur le mur de la cella, à la suite des critiques de Furtwaengler dans Deutsche Rundschau^ 1908, I,p. 368 (cf. Tbiersch diai Jalireshcfte, XI, p. 53) ; consulter aussi l’impor- tant mémoire de Dinsmoor dans .merican journal of archacologij, 1908. Les divers projets de restauration sont reproduits dans Smith, Calai, of sculpt. in the Br. Mus. II. p. 76-77. — ’6 Brunn, Griech. Kunstgeschichte, II, p. 128, Collignon, op. cit. I, p. 184 et Perrot-Cbipiez, op. cit. VIII, p. 204, croient reconnaître dans la facture des reliefs le souvenir des ligures travaillées au repoussé ou estampées sur ces revAlemenls de métal. — *7 cf. au mégaron d’AIkinoos dans Ilom. Odijss. VII, 86-87. liidgeviay, dans Journal of hell. studics, XXIX, 1909, p. XLv, cherche l’origine de la frise eojitinuc dans l’art achéen de la dernière période. — "* Perrot-Chipiez, op. cit. VI, p. 097 3f|. 710- 714 et fig. 307, pour l’adaptation de ces frises à la charpente. — ’9 Voir à ce sujet Perrol, La sculpture dans les temples grecs, <lans JUèlanges il. Weil, p. 355 sq. — 20 Birt, Die BuchroUe in der KunsI, 1907, p. 310 ; il csl revenu sur cette idée dans Rhein. Muséum, 1908, p. 47 ; Tliiersch, Zur Berkunfl des jonisehen Frieses, dins Wien. Jahreahefte. XI, 1908, p. 47-53. Cf. volumin, p. 968. — al Cf. le chapiteau à volutes, les coloinies zoophoriques, etc. ; références dans Thiersch, (oc. cit. p. 49. Pour liulluencc de I Egypte sur les arts mineurs de llonie archaïque, voir L. Curtius dans Alhen. Milth. XXXI, 1906, p. 174 sq.

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