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doit le couchant, afin que ceux qui venoient l’adorer, eussent le visage tourné vers l’orient. Autour étoit le sanctuaire.

Il y avoit ordinairement trois principaux autels dans le temple. Le plus considérable étoit placé au pié de la statue. Il étoit fort élevé, & par cette raison on l’appelloit altare. On brûloit dessus l’encens & les parfums, & l’on y faisoit des libations. Le second étoit devant la porte du temple, & servoit aux sacrifices. Le troisieme étoit un autel portatif nommé anclabris, sur lequel on posoit les offrandes & les vases sacrés. Les autels des dieux célestes étoient plus hauts que les autres ; ceux des dieux terrestres étoient plus bas, & ceux des dieux infernaux fort enfoncés.

Il y avoit toujours grand nombre de tables, de toutes sortes d’ustensiles & de vases sacrés dans les temples. On suspendoit les offrandes & les présens à la voûte nommée tholus. On attachoit aux piliers les dépouilles des ennemis, les tableaux votifs, les armes des gladiateurs hors du service.

Tout ce qui servoit aux temples, comme les lits sacrés appellés pulvinaria, & les présens qu’on y avoit offerts, étoient gardés dans une maniere de trésor appellé donarium. Les particuliers y mettoient aussi leurs effets en dépôt.

Les statues des hommes illustres, leurs images en bas-relief enchâssées dans des bordures appellées clypei votivi, & les tableaux représentans leurs belles actions & leurs victoires, faisoient l’ornement des temples. L’or, le bronze, le marbre & le porphyre y étoient employés avec tant de profusion, que l’on peut dire que la somptuosité de ces édifices étoit digne de la grandeur & de la magnificence de l’ancienne Rome. La plûpart étoient ouverts à tout le monde, & souvent même avant le jour pour les plus matineux, qui y trouvoient des flambeaux allumés.

Enfin il faut remarquer qu’il y avoit à Rome des temples particuliers nommés curies, qui répondoient à nos paroisses, & des temples communs à tous les Romains, où chacun pouvoit à sa dévotion aller faire des vœux & des sacrifices, mais sans être pour cela dispensé d’assister à ceux de sa curie, & surtout aux repas solemnels que Romulus y avoit institués pour entretenir la paix & l’union.

Ces temples communs étoient desservis par différens colleges de prêtres ; au lieu que chaque curie l’étoit par un seul qui avoit inspection sur tous ceux de son quartier. Ce prêtre ne relevoit que du grand curion, qui faisoit alors toutes les fonctions du souverain pontife. (D. J.)

Temple des assemblées du sénat, (Antiq. rom.) selon les regles de la religion, le sénat ne pouvoit s’assembler dans aucun lieu profane ou privé ; il falloit toujours que ce fût dans un lieu séparé, & solemnellement consacré à cet usage par les titres & les cérémonies des augures. Au rapport des anciens auteurs, on en voyoit plusieurs de cette espece dans les différentes parties de la ville. Le sénat s’y assembloit ordinairement selon la destination des consuls & la commodité particuliere de ces magistrats, ou celle des sénateurs, ou selon la nature de l’affaire qu’on y devoit proposer ou terminer. Ces maisons ou ces lieux d’assemblée du sénat furent appellés curies ; telle étoit la curie calabre bâtie, suivant l’opinion commune, par Romulus, la curie hostilienne bâtie par Tullius Hostilius, & la curie pompeïenne, par Pompée.

Mais les assemblées du sénat furent le plus souvent tenues dans certains temples dédiés à des divinités particulieres, tels que celui d’Apollon Palatin, de Bellone, de Castor & Pollux, de la Concorde, de la Foi, de Jupiter Capitolin, de Mars, de Tellus, de Vulcain, de la Vertu, &c. Voyez-en les articles.

Tous les temples que nous venons de nommer,

ont été célébrés par les anciens auteurs, parce que le sénat y fut souvent convoqué. Dans chacun de ces temples on voyoit un autel, & une statue élevée pour le culte particulier de la divinité dont il portoit le nom. On les appelloit curies, à raison de l’usage qu’on en faisoit ; ce nom leur étoit commun avec les curies propres ou les maisons du sénat, qui à cause de leur dédicace solemnelle, furent souvent appellées temples ; car le mot temple dans le premier sens qu’on y avoit attaché, ne signifioit rien de plus qu’un lieu séparé & consacré par les augures, soit qu’il fût ouvert ou fermé, ou qu’il se trouvât dans la ville ou dans la campagne. En conséquence de cette idée, nous voyons que le sénat s’assembloit dans certaines occasions en un lieu découvert, principalement dans les tems où les esprits étoient ébranlés par des récits de prodiges ; mais on étoit bien guéri de cette vaine superstition dans les siecles polis de la république ; les Romains, du tems de Séneque, ne donnoient plus dans ces erreurs populaires.

La politique en rendant les temples propres à l’usage du sénat, étoit de graver aussi fortement qu’il se pût, dans l’esprit des sénateurs, l’obligation de se conduire selon les lois de la justice & de la religion, ce qu’on pouvoit en quelque maniere se promettre de la sainteté du lieu & de la présence, pour ainsi dire, des dieux. Ce fut l’objet de l’un des censeurs, lorsqu’il enleva la statue de la déesse Concorde d’un quartier de la ville où elle se trouvoit placée, & qu’il la fit porter dans la curie qu’il consacra à cette divinité ; il présumoit ainsi, dit Cicéron, qu’il banniroit toute dissension de ce temple destiné au conseil public, & qu’il avoit consacré au culte de la Concorde.

Lorsque pour assembler le sénat, on choisissoit les temples des autres divinités, tels que celui de Bellone, de la Foi, de la Vertu, de l’Honneur, c’étoit toujours dans l’objet d’avertir les sénateurs par la sainteté du lieu, du respect & de la vénération dûe à ces vertus particulieres, que leurs ancêtres avoient déifiées, à raison de leur excellence. Ce fut pour accréditer de plus en plus cette maxime religieuse, qu’Auguste ordonna que chaque sénateur, avant que de prendre place, adressât la priere à la divinité du temple où le sénat étoit assemblé, & qu’il lui offrît de l’encens & du vin.

Le sénat en deux occasions particulieres s’assembloit hors les portes de Rome, ou dans le temple de Bellone, ou dans celui d’Apollon ; premierement, lorsqu’il étoit question de recevoir les ambassadeurs, particulierement ceux qui venoient de la part des ennemis, & auxquels on n’accordoit pas la liberté d’entrer dans la ville ; en second lieu, pour donner audience aux généraux romains, & régler avec eux quelque affaire importante ; car il ne leur étoit pas permis de venir au-dedans des murs, tant que leur commission duroit, ou qu’ils avoient le commandement actuel d’une armée. (D. J.)

Temple d’Adonis, (Antiq. égypt. & greq.) ce prince de Byblos dut son apothéose & l’étendue de son culte aux soins d’une épouse passionnée. On lui bâtit des temples en Syrie, en Palestine, en Perse, en Grece & dans les îles de la Méditerranée ; Amathonte, entr’autres, bâtit un temple célebre à ce nouveau dieu. Je ne dirois rien ici des honneurs que lui rendoit la ville de Dion en Macédoine, ni du temple qu’on lui avoit élevé dans cette ville, sans une particularité qui mérite quelque attention. Hercule passant auprès de ce temple, fut invité d’y entrer, pour assister à la fête d’Adonis ; mais ce héros se mocqua des habitans, & leur dit ces mots qui devinrent dans la suite un proverbe, οὐδεν ἱερόν, nihil sacrum. Ce propos dans la bouche d’un de nos philosophes modernes passeroit pour une belle impiété, mais Hercule étoit bien éloigné d’en dire ; il voulut au contraire