Page:Dostoïevski - Inédits.djvu/254

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Par exemple, voici que la saison d’hiver est terminée et Pétersbourg, du moins d’après le calendrier, appartient déjà au printemps. De longues colonnes des journaux commencent à se remplir des noms de ceux qui partent pour l’étranger. À votre étonnement, vous remarquez aussitôt que Pétersbourg est beaucoup plus dérangé au point de vue de sa santé que de sa poche. J’avoue que quand j’eus comparé ces deux sortes de dérangements, une peur panique me saisit, et à mon imagination apparut non la capitale mais l’hôpital. Cependant, je compris bientôt que je m’inquiétais en vain et que la bourse du père, provisoirement, serait encore assez large.

Vous verrez avec quelle munificence seront peuplées les campagnes, quels costumes extraordinaires traverseront les bosquets de bouleaux, et comment tous seront heureux et contents. Je suis même tout à fait sûr qu’un pauvre hère lui-même deviendra tout de suite content et heureux en regardant la joie générale. Au moins il verra gratuitement quelque chose qu’on ne peut voir pour aucun prix dans aucune ville de notre grand empire.

À propos de pauvre hère, il me semble que de toutes les misères possibles, la plus vilaine, la plus dégoûtante, la plus sale, la plus basse est la misère mondaine, bien qu’elle soit rare. Cette misère qui a dépensé son dernier sou et, par devoir, se montre encore en voiture, couvre de boue le piéton, qui, par un honnête travail, gagne son pain à la sueur de son front, et, malgré tout, a des serviteurs en gants blancs et cravate blanche. C’est une misère qui a honte de demander l’aumône, et n’a pas honte de l’accepter de la façon la plus insolente. Mais assez sur cette boue. Nous souhaitons sincèrement aux Pétersbourgeois