Page:Dostoïevski - Le Sous-sol, 1909.djvu/116

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core raison de lui. Mais n’aurait-il pas, en réalité, sous le désir de m’offenser, laissé pénétrer dans sa tête de mouton l’idée qu’il est infiniment mon supérieur et qu’il ne doit me considérer qu’avec un air protecteur ? Cette supposition seule me fit manquer de souffle.

— J’ai appris avec étonnement votre désir de prendre part à notre réunion, commença-t-il en zézayant et sifflant, et en traînant ses mots, ce qui ne lui arrivait pas autrefois. Nous n’avons pas eu l’occasion de nous rencontrer. Vous vous écartez de nous. Vous avez tort. Nous ne sommes pas si effrayants qu’il vous le semble. Eh bien, monsieur, en tout cas, je suis très content de renouveler…

Et il se détourna avec nonchalance pour mettre son chapeau sur l’appui de la fenêtre.

— Avez-vous attendu longtemps ? demanda Troudolubov.

— Je suis arrivé à cinq heures précises, comme on me l’avait indiqué hier, répondis-je à haute voix et avec irritation, ce qui promettait un prochain éclat.

— Est-ce que tu ne l’as pas informé que l’heure était changée ? s’adressa Troudolubov à Simonov.

— Non. Je l’avais oublié, répondit celui-ci, mais sans regret apparent et sans même me faire des excuses ; et il alla commander les hors-d’œuvre.