Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/232

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faits. Ils ont sçu l’orner par des traits de poësie nouveaux, et qui paroissent néanmoins tellement propres au sujet, qu’on est surpris que le premier peintre qui a medité sur la composition d’un crucifiment, ne se soit pas saisi de ces idées. Tel est le tableau de Rubens qu’on voit au maître autel des recolets d’Anvers. Jesus-Christ paroît mort entre les deux larrons qui sont encore vivans. Le bon larron regarde le ciel avec une confiance fondée sur les paroles de Jesus-Christ, et qui se fait remarquer à travers les douleurs du supplice. Rubens sans mettre des diables à côté de son mauvais larron comme l’avoient pratiqué plusieurs de ses devanciers, n’a pas laissé d’en faire un objet d’horreur. Il s’est servi pour cela de la circonstance du supplice de ce reprouvé qu’on lit dans l’évangile : que pour hâter sa mort on lui cassa les os. On voit par la meurtrissure de la jambe de ce malheureux qu’un bourreau l’a déja frappée d’une barre de fer qu’il tient à la main. L’impression d’un grand coup nous oblige à nous ramasser le corps par un mouvement violent et naturel. Le mauvais larron s’est donc soulevé sur son gibet, et dans cet effort que la douleur lui a

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