Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/32

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leur religion.

Beaucoup de personnes mettent tous les jours une partie considerable de leur bien à la merci des cartes et des dez, quoiqu’elles n’ignorent point les mauvaises suites du gros jeu. Les hommes enrichis par ses bienfaits sont connus de toute l’Europe comme le sont ceux ausquels il est arrivé quelqu’avanture singuliere. Les hommes riches et ruinez par le jeu passent en nombre les gens robustes que les medecins ont rendus infirmes. Les fols et les fripons sont les seuls qui joüent par un motif d’avarice et dans la vûë d’augmenter leur bien par des gains continuels. Ce n’est donc point l’avarice, c’est l’attrait du jeu qui fait que tant de personnes se ruinent à joüer. En effet, un joüeur habile doué du talent de combiner aisément une infinité de circonstances, et d’en tirer promptement des consequences justes ; un joüeur habile, dis-je, pourroit faire tous les jours un gain certain en ne risquant son argent qu’aux jeux où le succès dépend encore plus de l’habileté des tenans, que du hazard des cartes et des dez : cependant il préfere par goût les jeux où le gain dépend entierement du caprice des dez et des cartes, et dans lesquels son talent ne lui donne point de superiorité sur les