Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/358

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Il arrive même que lorsque nous apprenons une langue étrangere après que nous sommes parvenus à un certain âge, nous ne rapportions point immediatement à leur idée les mots de cette langue étrangere, mais bien aux mots de notre langue naturelle, qui sont associés avec ces idées là. Ainsi un françois qui apprend l’anglois ne lie point immediatement au mot anglois god l’idée de Dieu, mais bien au mot Dieu. Lorsqu’il entend ensuite prononcer god, l’idée qui se reveille d’abord en lui est celle de la signification que ce mot a en françois. L’idée de Dieu ne se reveille en lui qu’en second lieu. Il semble qu’il lui faille d’abord se traduire le premier mot à lui-même. Qu’on traite, si l’on veut, cette explication de subtilité, il sera toujours vrai de dire que dès que notre cerveau n’a pas été habitué dans l’enfance à nous representer promtement certaines idées aussi-tôt que certains sons viennent frapper nos oreilles, ces mots font sur nous une impression et plus foible et plus lente que les mots auxquels nos organes sont en habitude d’obéir dès l’enfance. L’operation que font les mots est dépendante du ressort mécanique de nos organes,

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