Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/359

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et par consequent elle doit dépendre de la facilité comme de la promptitude de leurs mouvemens. Voilà pourquoi le même discours ébranle en des tems inégaux, un homme d’un temperament vif, et un autre homme d’un temperament lent, quoiqu’ils en viennent enfin à prendre le même interêt à la chose dont il s’agit. L’experience qui est plus décisive dans les faits, que tous les raisonnemens, nous enseigne que la chose est ainsi. Un françois qui ne sçait l’espagnol que comme une langue étrangere, n’est pas affecté par le mot querer, comme par le mot aimer, quoique ces mots signifient la même chose. Cependant les vers latins plaisent plus, ils affectent plus que les vers françois. On ne sçauroit recuser le témoignage des étrangers à qui l’usage de la langue françoise est beaucoup plus familier aujourd’hui que l’usage de la langue latine. Ils disent tous que les vers françois leur font moins de plaisir que les vers latins, quoique la pluspart ils aïent appris le françois avant que d’apprendre le latin. Les françois mêmes qui sçavent assez bien le latin pour entendre facilement les poëtes qui ont