Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/441

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involontaires, qui montreront qu’elle ne fait point une attention actuelle à la contenance qu’il convient de garder dans une assemblée publique. Mais bien-tôt elle s’appercevra de son égarement momentanée, ou, pour parler plus juste, de sa distraction. Car il n’est pas vrai qu’elle ait crû durant son ravissement voir Rodrigue et Chimene. Elle a seulement été touchée presque aussi vivement qu’elle l’auroit été, si réellement elle avoit vû Rodrigue aux pieds de sa maîtresse dont il vient de tuer le pere. Il en est de même de la peinture. Le tableau d’Attila peint par Raphaël ne tire point son mérite de ce qu’il nous en impose assez pour nous séduire et pour nous faire croire que nous voïons véritablement saint Pierre et saint Paul en l’air, et menaçans l’épée à la main ce roi barbare entouré des troupes qu’il menoit saccager Rome. Mais dans le tableau dont je parle, Attila représente si naïvement un Scythe épouvanté, le pape Leon qui lui explique cette vision, montre une assurance si noble et un maintien si conforme à sa dignité, tous les assistans ressemblent si bien à des hommes qui

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se rencontrer