Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/442

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oient chacun dans la même circonstance où Raphaël a supposé ses differens personnages, les chevaux mêmes concourent si bien à l’action principale ; l’imitation est si vrai-semblable, qu’elle fait sur les spectateurs une grande partie de l’impression que l’évenement auroit pû faire sur eux. On raconte un grand nombre d’histoires d’animaux, d’enfans, et même d’hommes faits qui s’en sont laissé imposer par des tableaux, au point de les avoir pris pour les objets dont ils n’étoient qu’une imitation. Toutes ces personnes, dira-t-on, sont tombées dans l’illusion que vous regardez comme impossible. On ajoûtera que plusieurs oiseaux se sont froissé la tête contre la perspective de Ruel, trompez par son ciel si bien imité qu’ils ont crû pouvoir prendre l’essort à travers. Des hommes ont souvent adressé la parole à des portraits, croïans parler à d’autres hommes. Tout le monde sçait l’histoire du portrait de la servante de Rembrandt. Il l’avoit exposé à une fenêtre où cette fille se tenoit quelquefois, et les voisins y vinrent tour à tour pour faire conversation avec la toile.

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