Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/490

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tels que ceux dont nous parlons ici, fait des chants aussi variez que la nature même est variée. Les vers qui contiennent des peintures et des images, et ce qu’on appelle souvent par excellence de la poësie, ne donnent pas au musicien la même facilité de bien faire. La nature ne fournit presque rien à l’expression. L’art seul aide le musicien qui voudroit mettre en chant des vers tels que ceux où Corneille fait une peinture si magnifique du triumvirat. Le méchant par le prix au crime encouragé, le mari dans son lit par sa femme égorgé, le fils tout dégoûtant du meurtre de son pere et sa tête à la main demandant son salaire, etc. En effet, le musicien obligé de mettre en musique de pareils vers, ne trouveroit pas beaucoup de ressource pour sa mélodie dans la déclamation naturelle des paroles. Il faut donc qu’il se jette dans des chants, plûtôt nobles et imposans qu’expressifs, et parce que la nature ne lui aide pas à varier ces chants, il faut encore qu’ils deviennent à la fin uniformes. Comme la musique n’ajoûte presque point d’énergie aux

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