Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/78

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de la même main. Par exemple, on voit avec plus de plaisir une fête de village de Teniers qu’un de ses tableaux d’histoire, mais cela ne prouve rien. Tout le monde sçait que Teniers réussissoit aussi mal dans les compositions serieuses, qu’il réussissoit bien dans les compositions grotesques. Or en distinguant l’attention qu’on donne à l’art d’avec celle qu’on donne à l’objet imité, on trouvera toujours que j’ai raison d’avancer que l’imitation ne fait jamais sur nous plus d’impression que l’objet imité en pourroit faire. Cela est vrai même en parlant des tableaux, qui sont précieux par le merite seul de l’execution. L’art de la peinture est si difficile, il nous attaque par un sens, dont l’empire sur notre ame est si grand, qu’un tableau peut plaire par les seuls charmes de l’execution, independamment de l’objet qu’il répresente : mais je l’ai déja dit, notre attention et notre estime sont alors uniquement pour l’art de l’imitateur qui sçait nous plaire, même sans nous toucher. Nous admirons le pinceau qui a sçu contrefaire si bien la nature. Nous examinons comment l’artisan a fait pour tromper nos yeux, au