Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/98

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quelquefois les plus grands maîtres ont jugé deux ou trois mots necessaires à l’intelligence du sujet de leurs ouvrages, et même ils n’ont pas fait scrupule de les écrire dans un endroit du plan de leurs tableaux où ils ne gâtoient rien. Raphaël et le Carrache en ont usé ainsi : Coypel a placé de même des bouts de vers de Virgile dans la gallerie du palais roïal, pour aider à l’intelligence de ses sujets qu’il avoit tirez de l’éneïde. Déja les peintres dont on grave les ouvrages commencent à sentir l’utilité de ces inscriptions, et ils en mettent au bas des estampes qui se font d’après leurs tableaux. Le poëte arrive encore plus certainement que le peintre à l’imitation de son objet. Un poëte peut emploïer plusieurs traits pour exprimer la passion et le sentiment d’un de ses personnages. Si quelques-uns de ses traits avortent, s’ils ne frappent point précisement à son but ; s’ils ne rendent pas exactement toute l’idée qu’il veut exprimer, d’autres traits plus heureux peuvent venir au secours des premiers. Joints ensemble, ils feront ce qu’un seul n’auroit pû faire, et ils exprimeront ainsi l’idée du poëte dans toute sa force. Tous les traits dont Homere se sert