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Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/102

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ute où le hazard les peut avoir engagez, les artisans doüez de génie, s’apperçoivent, quand le hazard les égare, que la route qu’ils ont prise n’est point celle qui leur convient. Ils l’abandonnent pour en prendre une autre ; ils quittent celle de leur maître pour s’en faire une nouvelle. Par maître, j’entens ici les ouvrages aussi bien que les personnes. Raphaël, mort depuis deux cens ans, peut encore faire des éleves. Notre jeune artisan, doüé de génie, se forme donc lui-même une pratique pour imiter la nature, et il forme cette pratique des maximes résultantes de la refléxion qu’il fait sur son travail et sur le travail des autres. Chaque jour ajoûte ainsi de nouvelles lumieres à celles qu’il avoit acquises précedemment. Il ne fait pas une élegie ni un tableau, sans devenir meilleur peintre ou meilleur poëte ; et il surpasse enfin ceux qui peuvent avoir été plus heureux que lui, en maîtres et en modeles. Tout est pour lui l’occasion de quelque refléxion utile, et dans le milieu d’une plaine, il étudie avec autant de profit que s’il étoit dans son cabinet. Enfin, son mérite parvenu où il peut atteindre, se soûtient toûjours jusques à ce que la vieillesse affoiblissant les organes, sa