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Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/113

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e faire fortune, la necessité de subsister. Cette extrême indigence qui force à travailler pour avoir du pain, n’est propre qu’à égarer un homme de génie, qui sans consulter ses talens, s’attache, pressé par le besoin, aux genres de poësie qui sont plus lucratifs que les autres. Au lieu de composer des allegories ingénieuses et des satires excellentes, il fera de mauvaises pieces de théatre : le théatre est en France le Perou des poëtes. L’enthousiasme poëtique, n’est pas un de ces talens, que la crainte de mourir de faim sçait donner. Si, comme le dit Perse, qui nomme le ventre le pere de l’industrie, ingenü largitor venter, les entrailles à jeûn font croître l’esprit, ce n’est pas aux écrivains, Horace a bû son saoul quand il voit les menades. Dit Despreaux après Juvenal. En effet, comme ce poëte latin l’expose très-bien, mettre les pieds dans l’olimpe, entrer dans les projets des dieux, et donner des fêtes aux déesses ; ce n’est point la besogne d’un mal vêtu, qui ne sçait point où il pourra souper. Si Virgile, ajoûte Juvenal, n’avoit pas eu les commoditez de la vie, ces hidres, dont