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Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/338

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d’un récit sont touchans ou s’ils conviennent aux paroles, et si le chant en est mélodieux. Lorsqu’il s’agit de connoître si l’imitation qu’on nous présente dans un poëme ou dans la composition d’un tableau est capable d’exciter la compassion et d’attendrir, le sens destiné pour en juger, est le sens même qui auroit été attendri, c’est le sens qui auroit jugé de l’objet imité. C’est ce sixiéme sens qui est en nous sans que nous voïions ses organes. C’est la portion de nous-même qui juge sur l’impression qu’elle ressent, et qui, pour me servir des termes de Platon, prononce sans consulter la regle et le compas. C’est enfin ce qu’on appelle communément le sentiment. Le cœur s’agite de lui-même et par un mouvement qui précede toute déliberation, quand l’objet qu’on lui présente est réellement un objet touchant, soit que l’objet ait reçu son être de la nature, soit qu’il tienne son existence d’une imitation que l’art en a faite. Notre cœur est fait, il est organisé pour cela. Son operation prévient donc tous les raisonnemens, ainsi que l’operation de l’œil et celle de l’oreille les dévancent