Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/437

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anciens qu’il ne l’est en effet. Je dis donc en premier lieu, que le public se trompe quelquefois lorsque trop épris du mérite des productions nouvelles qui le touchent et qui lui plaisent, il décide en usurpant mal à propos les droits de la postérité, que ces productions sont du même genre que ceux des ouvrages des grecs ou des romains, qu’on appelle vulgairement des ouvrages consacrez, et que ses contemporains leurs auteurs, seront toujours les premiers poetes de leur langue. C’est ainsi que les contemporains de Ronsard et de la pleyade françoise se sont trompez, quand ils ont dit que les poetes françois ne seroient jamais mieux que ces nouveaux Promethées, qui pour parler poetiquement, n’avoient d’autre feu divin à leur disposition que celui qu’ils déroboient dans les écrits des anciens. Ronsard, l’astre le plus brillant de cette pleyade, avoit beaucoup de lettres, mais il avoit peu de génie. On ne trouve pas dans ses vers d’idée sublime ni même des tours d’expression heureux ni de figures nobles, qu’on ne retrouve dans les auteurs grecs et latins.