Page:Duliani - La ville sans femmes, 1945.djvu/264

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
262
LA VILLE SANS FEMMES

les précautions et les mesures de surveillance étaient bien prises. En tout cas, aussi bien pour les tentatives qui se sont produites dans les deux petites villes que j’ai habitées, comme pour celles qui se sont produites ailleurs, sauf dans un ou deux cas très exceptionnels, l’inanité de ces tentatives a été prouvée par l’arrestation presque immédiate des fuyards.

Pour qu’une fuite eut des chances d’aboutir, il eut fallu compter sur de solides connivences à l’extérieur : avoir quelqu’un en auto qui aurait attendu un temps indéterminé, dans un endroit bien fixé d’avance… des vêtements de rechange immédiatement disponibles et ensuite une retraite sûre où vivre caché, sans se montrer à âme vivante. Comme on le voit, c’étaient là des conditions presque impossibles à réaliser.

C’est pourquoi, comme, un jour, un jeune canadien venu me voir à l’hôpital me proposait le plus sérieusement du monde de m’évader avec lui, je lui répondis de la manière suivante :

— Je regrette, mais je n’accepte pas… parce que je ne suis pas fou.

Et je lui démontrai toutes les difficultés de l’entreprise.

— Cela ne fait rien, me dit-il… J’essaierai quand même…

Trois semaines plus tard il exécutait son plan. Parti avec un groupe de travailleurs dans la forêt, il s’écarta habilement. Au moment du retour, on constata qu’il manquait à l’appel. Des battues furent aussitôt organisées et le fuyard, mourant de faim, malgré la précau-