Page:Dumas - Leçons sur la philosophie chimique, 1878.djvu/160

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
156
PHILOSOPHIE CHIMIQUE.

les malheureux ouvriers qui périssaient si souvent asphyxiés par ces gaz délétères ou brûlés par suite de leur explosion imprévue. Eh bien ! Lavoisier, fermier général et millionnaire, Lavoisier qui, dans chaque minute dérobée aux recherches qu’exigeait sa théorie, devait voir un vol fait à sa gloire, Lavoisier se livre sur ce sujet, avec son calme et sa persévérance accoutumés, à une longue suite d’expériences si nauséabondes que je n’aurais pas le courage d’en rappeler ici le moindre détail. Elles durent pendant plusieurs mois, et Lavoisier se dévoue à cette étude rebutante par de simples vues d’humanité : car il n’espérait rien de ses expériences, si ce n’est le moyen de sauver la vie à quelques malheureux. Ces essais terminés, il les raconte avec une simplicité parfaite, comme si cette charité sublime qui avait éveillé son attention lui eût épargné ou ennobli tous les dégoûts de ce long travail.

Vous le voyez, rien n’égale l’activité de Lavoisier comme savant. Pendant quatorze années, nos Mémoires académiques n’ont jamais manqué de s’enrichir de quelques-uns de ses écrits, inégalement distribués, il est vrai, car il est certaines années où ils sont très-nombreux et d’autres où il semble que Lavoisier se repose. Ainsi, l’année 1777 est remplie de ses Mémoires ; les années 1781, 1782 en sont encore remplies, à tel point que les volumes de l’Aca-