Page:Dupuis - Abrégé de l’origine de tous les cultes, 1847.djvu/401

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de ce paysan qu’on accusait de sortilège pour rendre ses champs fertiles. Toute opinion contraire à celle-ci repose sur une base fausse, et dans aucun cas, nul mortel n’a droit de tromper son semblable : autrement la Divinité aurait besoin, pour s’assurer du respect des hommes, de s’appuyer d’un système d’imposture ; idée qui me révolte, et cela parce qu’elle l’outrage. Ainsi, sous ce rapport, la religion est une institution non-seulement inutile, mais absurde. Je sais que l’on me répondra que si la Divinité n’a pas besoin du culte des mortels pour rendre l’homme aussi heureux qu’il peut l’être, les sociétés en ont besoin, et que les religions ont été inventées, non pas pour la divinité, sur qui les prières ne font rien, et qui a tout arrangé, tout voulu sans nous consulter, mais pour les hommes ; que la morale et la législation ne peuvent se soutenir qu’autant qu’elles sont appuyées sur les bases d’une religion ; que les législateurs et les philosophes ne peuvent bien conduire les hommes s’ils ne s’associent aux prêtres. Ici l’imposture se couvre d’un voile spécieux. Ce ne sont plus les champs que l’on prétend fertiliser en invoquant les cieux, ce sont les sociétés que l’on veut maintenir et perfectionner en faisant intervenir les dieux. Je pourrais répondre d’abord que l’on peut séparer très bien la première idée de la seconde, que l’on peut et que même on doit établir une filiation entre les lois des sociétés et celles de la Nature, entre la justice humaine et celle que l’on nomme divine, et qui n’est que la raison éternelle, sans qu’on ait besoin d’un Jupiter,