Page:Duranty - Les Combats de Françoise du Quesnoy.djvu/30

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puisse vivre dans de pareils tourments. Je ne pourrais le supporter. Je préférerais les laisser faire… Pourquoi cette querelle ? Je me sauverais à mille lieues.

— Il a perdu 80,000 francs au jeu il y a quelques jours ! S’il continue, mon salon passera pour une maison de jeu. Il faut que je sache comment il a payé. On me reproche de vouloir le diriger et en même temps de ne point le diriger.

Un domestique entra en ce moment, apportant une corbeille de fleurs assez belle. On ne savait de quelle part elle venait. L’arrivée de ce présent mystérieux ramena la bonne humeur, l’entrain, la curiosité de Mlle Guay, mais Charlotte vit Françoise rouge, embarrassée.

— J’avais prophétisé sans le savoir, dit-elle, voilà une chose charmante.

— Et qui me déplaît, reprit Mme du Quesnoy. Cette prétention de secret me gêne. Qu’est-ce que cela signifie ?

— Si c’était de Joachim ? demanda Charlotte.

Françoise haussa les épaules amicalement.

— On dit qu’il y a toujours un papier dans les bouquets, reprit Mlle Guay, feignant de chercher avec beaucoup de soin. Il me vient une idée folle comme toutes mes idées, continua-t-elle ; fais donc la coquette une fois dans ta vie. Porte une de ces fleurs ce soir ; rends ton mari jaloux. S’il revenait à toi, tu le changerais…

Mme du Quesnoy fit un geste qui faillit glacer Charlotte, tant il indiquait un irrémissible éloignement.