Page:Durkheim - Les Règles de la méthode sociologique.djvu/143

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contact avec les phénomènes sociaux, on est, au contraire, surpris de l’étonnante régularité avec laquelle ils se reproduisent dans les mêmes circonstances. Même les pratiques les plus minutieuses et, en apparence, les plus puériles, se répètent avec la plus étonnante uniformité. Telle cérémonie nuptiale, purement symbolique à ce qu’il semble, comme l’enlèvement de la fiancée, se retrouve exactement partout où existe un certain type familial, lié lui-même à toute une organisation politique. Les usages les plus bizarres, comme la couvade, le lévirat, l’exogamie, etc., s’observent chez les peuples les plus divers et sont symptomatiques d’un certain état social. Le droit de tester apparaît à une phase déterminée de l’histoire et, d’après les restrictions plus ou moins importantes qui le limitent, on peut dire à quel moment de l’évolution sociale on se trouve. Il serait facile de multiplier les exemples. Or cette généralité des formes collectives serait inexplicable si les causes finales avaient en sociologie la prépondérance qu’on leur attribue.

Quand donc on entreprend d’expliquer un phénomène social, il faut rechercher séparément la cause efficiente qui le produit et la fonction qu’il remplit. Nous nous servons du mot de fonction de préférence à celui de fin ou de but, précisément parce que les phénomènes sociaux n’existent généralement pas en vue des résultats utiles qu’ils produisent. Ce qu’il faut déterminer, c’est s’il y a correspondance entre le fait considéré et les besoins généraux de l’organisme social et en quoi consiste cette correspondance, sans se préoccuper de savoir si elle a été intentionnelle ou non. Toutes ces questions d’inten-